Łukasz Marcin Bonda.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:319
Date05 June 2012
Celex Number62010CJ0489
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑489/10
62010CJ0489

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

5 juin 2012 ( *1 )

«Politique agricole commune — Régime de paiement unique à la surface — Règlement (CE) no 1973/2004 — Article 138, paragraphe 1 — Exclusion du bénéfice de l’aide en cas d’inexactitude de la superficie déclarée — Caractère administratif ou pénal de cette sanction — Règle du non-cumul des sanctions pénales — Principe ne bis in idem»

Dans l’affaire C-489/10,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sąd Najwyższy (Pologne), par décision du 27 septembre 2010, parvenue à la Cour le 12 octobre 2010, dans la procédure pénale contre

Łukasz Marcin Bonda,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. A. Tizzano, J. N. Cunha Rodrigues, K. Lenaerts, J.-C. Bonichot et Mme A. Prechal, présidents de chambre, M. A. Rosas, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. K. Schiemann, A. Borg Barthet (rapporteur), L. Bay Larsen, Mme M. Berger et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme K. Sztranc-Sławiczek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 octobre 2011,

considérant les observations présentées:

pour M. Bonda, par Me J. Markowicz, adwokat,

pour le gouvernement polonais, par MM. M. Szpunar, D. Krawczyk et B. Majczyna, en qualité d’agents,

pour le gouvernement autrichien, par Mme C. Pesendorfer, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par M. A. Bouquet et Mme A. Szmytkowska, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 15 décembre 2011,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 138, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1973/2004 de la Commission, du 29 octobre 2004, portant modalités d’application du règlement (CE) no 1782/2003 du Conseil en ce qui concerne les régimes d’aide prévus aux titres IV et IV bis dudit règlement et l’utilisation de terres mises en jachère pour la production de matières premières (JO L 345, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre de poursuites engagées contre M. Bonda en raison de la fraude commise par ce dernier dans sa déclaration concernant la superficie agricole admissible au bénéfice du paiement unique à la surface.

Le cadre juridique

Le droit international

3

Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, du protocole no 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signé à Strasbourg le 22 novembre 1984 (ci-après le «protocole no 7»):

«Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même État en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet État.»

Le droit de l’Union

Le règlement (CE, Euratom) no 2988/95

4

Le règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO L 312, p. 1), énonce à ses quatrième, cinquième, neuvième, dixième et douzième considérants:

«considérant que l’efficacité de la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés requiert la mise en place d’un cadre juridique commun à tous les domaines couverts par les politiques communautaires;

considérant que les comportements constitutifs d’irrégularités, ainsi que les mesures et sanctions administratives y relatives, sont prévus dans des réglementations sectorielles en conformité avec le présent règlement;

[…]

considérant que les mesures et les sanctions communautaires prises dans le cadre de la réalisation des objectifs de la politique agricole commune font partie intégrante des régimes d’aides; qu’elles ont une finalité propre qui laisse entière l’appréciation par les autorités compétentes des États membres, sur le plan du droit pénal, du comportement des opérateurs économiques concernés; que leur efficacité doit être assurée par l’effet immédiat de la norme communautaire et par la pleine application de l’ensemble des mesures communautaires, dès lors que l’adoption de mesures conservatoires n’a pas permis d’atteindre cet objectif;

considérant que, en vertu de l’exigence générale d’équité et du principe de proportionnalité, ainsi qu’à la lumière du principe ne bis in idem, il y a lieu de prévoir, dans le respect de l’acquis communautaire et des dispositions prévues par les réglementations communautaires spécifiques existant au moment de l’entrée en vigueur du présent règlement, des dispositions appropriées pour éviter un cumul de sanctions pécuniaires communautaires et de sanctions pénales nationales imposées pour les mêmes faits à la même personne;

[…]

considérant que le présent règlement s’applique sans préjudice de l’application du droit pénal des États membres».

5

L’article 1er dudit règlement dispose:

«1. Aux fins de la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit communautaire.

2. Est constitutive d’une irrégularité toute violation d’une disposition du droit communautaire résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue.»

6

Aux termes de l’article 2 du même règlement:

«1. Les contrôles et les mesures et sanctions administratives sont institués dans la mesure où ils sont nécessaires pour assurer l’application correcte du droit communautaire. Ils doivent revêtir un caractère effectif, proportionné et dissuasif, afin d’assurer une protection adéquate des intérêts financiers des Communautés.

2. Aucune sanction administrative ne peut être prononcée tant qu’un acte communautaire antérieur à l’irrégularité ne l’a pas instaurée. En cas de modification ultérieure des dispositions portant sanctions administratives et contenues dans une réglementation communautaire, les dispositions moins sévères s’appliquent rétroactivement.

3. Les dispositions du droit communautaire déterminent la nature et la portée des mesures et sanctions administratives nécessaires à l’application correcte de la réglementation considérée en fonction de la nature et de la gravité de l’irrégularité, du bénéfice accordé ou de l’avantage reçu et du degré de responsabilité.

4. Sous réserve du droit communautaire applicable, les procédures relatives à l’application des contrôles et des mesures et sanctions communautaires sont régies par le droit des États membres.»

7

L’article 4 du règlement no 2988/95 énonce:

«1. Toute irrégularité entraîne, en règle générale, le retrait de l’avantage indûment obtenu:

par l’obligation de verser les montants dus ou de rembourser les montants indûment perçus,

par la perte totale ou partielle de la garantie constituée à l’appui de la demande d’un avantage octroyé ou lors de la perception d’une avance.

2. L’application des mesures visées au paragraphe 1 est limitée au retrait de l’avantage obtenu augmenté, si cela est prévu, d’intérêts qui peuvent être déterminés de façon forfaitaire.

3. Les actes pour lesquels il est établi qu’ils ont pour but d’obtenir un avantage contraire aux objectifs du droit communautaire applicable en l’espèce, en créant artificiellement les conditions requises pour l’obtention de cet avantage, ont pour conséquence, selon le cas, soit la non-obtention de l’avantage, soit son retrait.

4. Les mesures prévues par le présent article ne sont pas considérées comme des sanctions.»

8

L’article 5 dudit règlement est libellé comme suit:

«1. Les irrégularités intentionnelles ou causées par négligence peuvent conduire aux sanctions administratives suivantes:

a)

le paiement d’une amende administrative;

b)

le paiement d’un montant excédant les sommes indûment perçues ou éludées, augmentées, le cas échéant, d’intérêts; ce montant complémentaire, déterminé selon un pourcentage à fixer dans les réglementations spécifiques, ne peut dépasser le niveau strictement nécessaire pour lui donner un caractère dissuasif;

c)

la privation totale ou partielle d’un avantage octroyé par la réglementation communautaire, même si l’opérateur a bénéficié indûment d’une partie seulement de cet avantage;

d)

l’exclusion ou le retrait du bénéfice de l’avantage pour une période postérieure à celle de l’irrégularité;

e)

le retrait temporaire d’un agrément ou d’une reconnaissance nécessaire à la participation à un régime d’aide communautaire;

f)

la perte d’une garantie ou d’un cautionnement constitué aux fins du respect des conditions d’une réglementation ou la reconstitution du montant d’une garantie indûment libérée;

g)

d’autres sanctions à caractère exclusivement économique, de nature et de portée équivalentes, prévues dans les réglementations sectorielles adoptées par le Conseil en fonction des nécessités propres au secteur concerné et dans le respect des compétences d’exécution conférées à la Commission par le Conseil.

2. Sans préjudice des dispositions des réglementations sectorielles existant au moment de l’entrée en vigueur du présent règlement, les autres irrégularités ne peuvent donner lieu qu’aux sanctions non assimilables à une sanction pénale...

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