Martin Luksan v Petrus van der Let.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:65
Date09 February 2012
Celex Number62010CJ0277
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑277/10
62010CJ0277

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

9 février 2012 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Rapprochement des législations — Propriété intellectuelle — Droit d’auteur et droits voisins — Directives 93/83/CEE, 2001/29/CE, 2006/115/CE et 2006/116/CE — Partage des droits d’exploitation d’une œuvre cinématographique, par voie contractuelle, entre le réalisateur principal et le producteur de l’œuvre — Réglementation nationale attribuant ces droits, exclusivement et de plein droit, au producteur du film — Possibilité de dérogation à cette règle par un accord entre les parties — Droits à rémunération subséquents»

Dans l’affaire C-277/10,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Handelsgericht Wien (Autriche), par décision du 17 mai 2010, parvenue à la Cour le 3 juin 2010, dans la procédure

Martin Luksan

contre

Petrus van der Let,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de chambre, M. J. Malenovský (rapporteur), Mme R. Silva de Lapuerta, MM. G. Arestis et T. von Danwitz, juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

greffier: M. K. Malacek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 5 mai 2011,

considérant les observations présentées:

pour M. Luksan, par Me M. Walter, Rechtsanwalt,

pour M. van der Let, par Me Z. van der Let-Vangelatou, Rechtsanwältin,

pour le gouvernement autrichien, par Mme C. Pesendorfer, en qualité d’agent,

pour le gouvernement espagnol, par Mme N. Díaz Abad, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mme J. Samnadda et M. F. W. Bulst, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 septembre 2011,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation:

des articles 2 et 4 de la directive 92/100/CEE du Conseil, du 19 novembre 1992, relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d’auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle (JO L 346, p. 61);

des articles 1er et 2 de la directive 93/83/CEE du Conseil, du 27 septembre 1993, relative à la coordination de certaines règles du droit d’auteur et des droits voisins du droit d’auteur applicables à la radiodiffusion par satellite et à la retransmission par câble (JO L 248, p. 15);

de l’article 2 de la directive 93/98/CEE du Conseil, du 29 octobre 1993, relative à l’harmonisation de la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins (JO L 290, p. 9), et

des articles 2, 3 et 5 de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (JO L 167, p. 10).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le réalisateur principal d’un film documentaire, M. Luksan, au producteur de ce film, M. van der Let, au sujet de l’exécution du contrat par lequel le premier aurait cédé au second ses droits d’auteur et certains droits d’exploitation sur ledit film.

Le cadre juridique

Le droit international

La convention de Berne

3

L’article 14 bis de la convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques (acte de Paris du 24 juillet 1971), dans sa version résultant de la modification du 28 juillet 1979 (ci-après la «convention de Berne»), dispose:

«(1) Sans préjudice des droits de l’auteur de toute œuvre qui pourrait avoir été adaptée ou reproduite, l’œuvre cinématographique est protégée comme une œuvre originale. Le titulaire du droit d’auteur sur l’œuvre cinématographique jouit des mêmes droits que l’auteur d’une œuvre originale, y compris les droits visés à l’article précédent.

(a)

La détermination des titulaires du droit d’auteur sur l’œuvre cinématographique est réservée à la législation du pays où la protection est réclamée.

(b)

Toutefois, dans les pays de l’Union où la législation reconnaît parmi ces titulaires les auteurs des contributions apportées à la réalisation de l’œuvre cinématographique, ceux-ci, s’ils se sont engagés à apporter de telles contributions, ne pourront, sauf stipulation contraire ou particulière, s’opposer à la reproduction, la mise en circulation, la représentation et l’exécution publiques, la transmission par fil au public, la radiodiffusion, la communication au public, le sous-titrage et le doublage des textes, de l’œuvre cinématographique.

(c)

La question de savoir si la forme de l’engagement visé ci-dessus doit, pour l’application du sous-alinéa b) précédent, être ou non un contrat écrit ou un acte écrit équivalent est réglée par la législation du pays de l’Union où le producteur de l’œuvre cinématographique a son siège ou sa résidence habituelle. Est toutefois réservée à la législation du pays de l’Union où la protection est réclamée la faculté de prévoir que cet engagement doit être un contrat écrit ou un acte écrit équivalent. Les pays qui font usage de cette faculté devront le notifier au Directeur général par une déclaration écrite qui sera aussitôt communiquée par ce dernier à tous les autres pays de l’Union.

(d)

Par ‘stipulation contraire ou particulière’, il faut entendre toute condition restrictive dont peut être assorti ledit engagement.

(3) À moins que la législation nationale n’en décide autrement, les dispositions de l’alinéa 2) b) ci-dessus ne sont applicables ni aux auteurs des scénarios, des dialogues et des œuvres musicales, créés pour la réalisation de l’œuvre cinématographique, ni au réalisateur principal de celle-ci. Toutefois, les pays de l’Union dont la législation ne contient pas des dispositions prévoyant l’application de l’alinéa 2) b) précité audit réalisateur devront le notifier au Directeur général par une déclaration écrite qui sera aussitôt communiquée par ce dernier à tous les autres pays de l’Union.»

Le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur

4

L’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) a adopté à Genève, le 20 décembre 1996, le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur. Ce traité a été approuvé au nom de la Communauté européenne par la décision 2000/278/CE du Conseil, du 16 mars 2000 (JO L 89, p. 6).

5

Le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur prévoit à son article 1er, paragraphe 4, que les parties contractantes doivent se conformer aux articles 1er à 21 de la convention de Berne.

Le droit de l’Union

La directive 93/83

6

L’article 1er, paragraphe 5, de la directive 93/83 dispose:

«Aux fins de la présente directive, le réalisateur principal d’une œuvre cinématographique ou audiovisuelle est considéré comme l’auteur ou l’un des auteurs. Les États membres peuvent prévoir que d’autres personnes sont considérées comme coauteurs.»

7

Le chapitre II de cette directive, intitulé «Radiodiffusion par satellite», comprend l’article 2 qui, sous le titre «Droit de radiodiffusion», énonce:

«Les États membres prévoient le droit exclusif de l’auteur d’autoriser la communication au public par satellite d’œuvres protégées par le droit d’auteur, sous réserve des dispositions du présent chapitre.»

La directive 2001/29

8

Les cinquième, neuvième à onzième, vingtième, trente et unième et trente-cinquième considérants de la directive 2001/29 sont libellés en ces termes:

«(5)

L’évolution technologique a multiplié et diversifié les vecteurs de création, de production et d’exploitation. Si la protection de la propriété intellectuelle ne nécessite aucun concept nouveau, les règles actuelles en matière de droit d’auteur et de droits voisins devront être adaptées et complétées pour tenir dûment compte des réalités économiques telles que l’apparition de nouvelles formes d’exploitation.

[...]

(9)

Toute harmonisation du droit d’auteur et des droits voisins doit se fonder sur un niveau de protection élevé, car ces droits sont essentiels à la création intellectuelle. Leur protection contribue au maintien et au développement de la créativité dans l’intérêt des auteurs, des interprètes ou exécutants, des producteurs, des consommateurs, de la culture, des entreprises et du public en général. La propriété intellectuelle a donc été reconnue comme faisant partie intégrante de la propriété.

(10)

Les auteurs ou les interprètes ou exécutants, pour pouvoir poursuivre leur travail créatif et artistique, doivent obtenir une rémunération appropriée pour l’utilisation de leurs œuvres, de même que les producteurs pour pouvoir financer ce travail. L’investissement nécessaire pour créer des produits, tels que des phonogrammes, des films ou des produits multimédias, et des services tels que les services à la demande, est considérable. Une protection juridique appropriée des droits de propriété intellectuelle est nécessaire pour garantir une telle rémunération et permettre un rendement satisfaisant de l’investissement.

(11)

Un système efficace et rigoureux de protection du droit d’auteur et des droits voisins est l’un des principaux instruments permettant de garantir à la création et à la production culturelles européennes l’obtention des ressources nécessaires et de préserver l’autonomie et la dignité des créateurs et interprètes.

[...]

(20)

La présente directive se fonde sur des principes et des règles déjà établis par les directives en vigueur dans ce domaine, notamment [la directive 91/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991, concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur (JO L...

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