Commission of the European Communities v Italian Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:717
CourtCourt of Justice (European Union)
Date19 November 2009
Docket NumberC-540/07
Celex Number62007CJ0540

Affaire C-540/07

Commission des Communautés européennes

contre

République italienne

«Manquement d’État — Libre circulation des capitaux — Article 56 CE — Articles 31 et 40 de l’accord sur l’EEE — Fiscalité directe — Retenue à la source opérée sur les dividendes sortants — Imputation au siège du bénéficiaire du dividende, en vertu d’une convention préventive de la double imposition»

Sommaire de l'arrêt

1. Libre circulation des capitaux — Restrictions — Législation fiscale — Impôt sur les sociétés — Imposition des dividendes

(Art. 56, § 1, CE)

2. Accords internationaux — Accord créant l'Espace économique européen — Liberté d'établissement — Libre circulation des capitaux — Restrictions — Législation fiscale — Impôt sur les sociétés — Imposition des dividendes

(Accord EEE, art. 31 et 40)

1. Manque aux obligations lui incombant en vertu de l'article 56, paragraphe 1, CE, un État membre qui soumet les dividendes distribués à des sociétés établies dans d’autres États membres à un régime fiscal moins favorable que celui appliqué aux dividendes distribués aux sociétés résidentes, en exemptant d'imposition, à hauteur de 95 %, les dividendes distribués à des sociétés résidentes et en soumettant les dividendes distribués à des sociétés non-résidentes à une retenue à la source au taux de 27 %, une partie de cette somme pouvant, par ailleurs et sur demande, être remboursée.

En effet, une telle différence de traitement n'est pas remise en cause du fait de l'application de conventions tendant à éviter la double imposition. Certes, il ne saurait être exclu qu'un État membre parvienne à garantir le respect de ses obligations résultant du traité en concluant une convention tendant à éviter la double imposition avec un autre État membre. Il est toutefois nécessaire à cette fin que l’application de la convention tendant à éviter la double imposition permette de compenser les effets de la différence de traitement issue de la législation nationale. Ce n’est en effet que dans l’hypothèse dans laquelle l’impôt retenu à la source en application de la législation nationale peut être imputé sur l’impôt dû dans l’autre État membre à concurrence de la différence de traitement issue de la législation nationale que la différence de traitement entre les dividendes distribués à des sociétés établies dans d’autres États membres et les dividendes distribués aux sociétés résidentes disparaît totalement. Dès lors qu'une telle imputation sur l'impôt dû dans l'autre État membre n'est pas garantie par la législation nationale en cause, et que le choix d'imposer, dans l'autre État membre, les revenus en provenance de l'État membre concerné ou le niveau auquel ils sont imposés ne dépend pas de cet État mais des modalités d'imposition définies par l'autre État membre, l'imputation de l’impôt retenu à la source sur l’impôt dû dans l’autre État membre, en application des stipulations des conventions tendant à éviter la double imposition, ne permet pas dans tous les cas de compenser la différence de traitement issue de l’application de la législation nationale.

Cette différence de traitement n'est pas non plus remise en cause au motif qu’il faudrait tenir compte de l’intégralité du système d’imposition national, dont l’objectif serait d’assurer d’une manière directe ou indirecte l’imposition des personnes physiques bénéficiaires finaux des dividendes, et notamment de la circonstance que la personne physique résidente et actionnaire est assujettie à l’impôt personnel sur son revenu, de sorte que le niveau d’imposition entre l’actionnaire personne physique résidente et l’actionnaire non-résident serait en réalité équivalent. En effet, sont ici comparés des régimes et des situations qui ne sont pas comparables, à savoir d’un côté des personnes physiques bénéficiaires de dividendes nationaux et leur régime d’imposition sur le revenu et, de l’autre, des sociétés de capitaux bénéficiaires de dividendes sortants et la retenue à la source qui est prélevée par l'État membre concerné. Est à cet égard sans incidence la circonstance que la législation de cet État viserait à corriger un éventuel déséquilibre au niveau de l’imposition des personnes physiques qui détiennent des participations dans les sociétés auxquelles les dividendes sont versés.

Or, une telle différence de traitement est susceptible de dissuader les sociétés établies dans d’autres États membres de procéder à des investissements dans l'État membre concerné et constitue, par conséquent, une restriction à la libre circulation des capitaux prohibée, en principe, par l’article 56, paragraphe 1, CE.

Il est vrai que, à l’égard des mesures prévues par un État membre afin de prévenir ou d’atténuer l’imposition en chaîne ou la double imposition économique de bénéfices distribués par une société résidente, les actionnaires bénéficiaires résidents ne se trouvent pas nécessairement dans une situation comparable à celle d’actionnaires bénéficiaires résidents d’un autre État membre. Toutefois, à partir du moment où un État membre, de manière unilatérale ou par voie conventionnelle, assujettit à l’impôt sur le revenu non seulement les actionnaires résidents, mais également les actionnaires non-résidents, pour les dividendes qu’ils perçoivent d’une société résidente, la situation desdits actionnaires non-résidents se rapproche de celle des actionnaires résidents. En effet, c’est le seul exercice par ce même État de sa compétence fiscale qui, indépendamment de toute imposition dans un autre État membre, engendre un risque d’imposition en chaîne ou de double imposition économique. En pareil cas, pour que les bénéficiaires non-résidents ne soient pas confrontés à une restriction à la libre circulation des capitaux prohibée, en principe, par l’article 56 CE, l’État de résidence de la société distributrice doit veiller à ce que, par rapport au mécanisme prévu par son droit national afin de prévenir ou d’atténuer l’imposition en chaîne ou la double imposition économique, les non-résidents soient soumis à un traitement équivalent à celui dont bénéficient les résidents. Ainsi, lorsque cet État membre a choisi d'exercer sa compétence fiscale sur les dividendes distribués à des sociétés établies dans d’autres États membres, les non-résidents bénéficiaires de ces dividendes se trouvent dans une situation comparable à celle des résidents en ce qui concerne le risque de double imposition économique des dividendes distribués par les sociétés résidentes, de sorte que les bénéficiaires non-résidents ne peuvent être traités différemment des bénéficiaires résidents.

Le traitement moins favorable en cause ne saurait être justifié par la nécessité d'assurer la cohérence du système fiscal ou le maintien d'une répartition équilibrée du pouvoir d'imposition. Il ne peut, en outre, être justifié au regard de la lutte contre la fraude fiscale. En effet, une telle justification n’est admissible que si elle vise des montages purement artificiels dont le but est de contourner la loi fiscale, ce qui exclut toute présomption générale de fraude. Or, c’est de manière générale que tous les dividendes distribués à des sociétés établies dans d’autres États membres sont soumis à un régime fiscal moins favorable. Par ailleurs, la directive 77/799, concernant l’assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs et indirects, peut être invoquée par l'État membre afin d’obtenir des autorités compétentes d’un autre État membre toutes les informations nécessaires pour lui permettre d’établir correctement le montant des taxes couvertes par ladite directive.

Le traitement moins favorable auquel la législation nationale en cause soumet les dividendes distribués à des sociétés établies dans d’autres États membres constitue, par suite, une restriction à la libre circulation des capitaux incompatible avec l’article 56, paragraphe 1, CE.

(cf. points 32, 36-40, 42-45, 51-54, 56, 58-61, 64, disp. 1)

2. Ne manque pas aux obligations lui incombant en vertu des articles 31 et 40 de l'accord sur l'Espace économique européen (EEE), un État membre qui soumet les dividendes distribués à des sociétés établies dans d’autres États de l'EEE à un régime fiscal moins favorable que celui appliqué aux dividendes distribués aux sociétés résidentes, en exemptant d'imposition, à hauteur de 95 %, les dividendes distribués à des sociétés résidentes et en soumettant les dividendes distribués à des sociétés non-résidentes à une retenue à la source aux taux de 27 %, une partie de cette somme pouvant, par ailleurs et sur demande, être remboursée.

Certes, le traitement moins favorable auquel la législation nationale en cause soumet les dividendes distribués à des sociétés établies dans les États parties à l’accord EEE constitue une restriction à la libre circulation des capitaux au sens de l’article 40 de l’accord EEE, ainsi qu'à la liberté d'établissement au sens de l'article 31 du même accord.

Toutefois, cette restriction est justifiée par la raison impérieuse d’intérêt général tenant à la lutte contre la fraude fiscale. En effet, les principes relatifs aux restrictions à l’exercice des libertés de circulation au sein de la Communauté ne saurait être intégralement transposés aux mouvements de capitaux entre les États membres et les États tiers, de tels mouvements s’inscrivant dans un contexte juridique différent. À cet égard, le cadre de coopération entre les autorités compétentes des États membres établi par la directive 77/799, concernant l'assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs et indirects, n’existe pas entre celles-ci et les autorités compétentes d’un État tiers lorsque ce dernier n’a pris aucun engagement d’assistance mutuelle. En l'absence de tout dispositif d'échange de renseignements avec un État partie à l'accord EEE, et lorsque les conventions tendant à prévenir la double imposition signées avec d'autres États parties à...

To continue reading

Request your trial
11 practice notes
  • X GmbH contra Finanzamt Stuttgart - Körperschaften.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 5 June 2018
    ...de dicho motivo con la prevención del fraude fiscal, véanse, en particular, las sentencias de 19 de noviembre de 2009, Comisión/Italia (C‑540/07, EU:C:2009:717), apartado 54, de 28 de octubre de 2010, Établissements Rimbaud (C‑72/09, EU:C:2010:645), apartado 34, y de 24 de noviembre de 2016......
  • European Commission v Portuguese Republic.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 7 April 2011
    ...C‑478/98, Rec. p. I‑7587, point 39, et, s’agissant de la lutte contre la fraude fiscale, arrêt du 19 novembre 2009, Commission/Italie, C‑540/07, Rec. p. I‑10983, point 55). 61 Encore faut-il cependant que la restriction à la libre circulation des capitaux soit propre à garantir la réalisati......
  • European Commission v Federal Republic of Germany.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 20 October 2011
    ...I‑11673, apartado 36; de 8 de noviembre de 2007, Amurta, C‑379/05, Rec. p. I‑9569, apartado 16; de 19 de noviembre de 2009, Comisión/Italia, C‑540/07, Rec. p. I‑10983, apartado 28, y de 3 de junio de 2010, Comisión/España, C‑487/08, Rec. p. I‑0000, apartado 37). 45 Corresponde en especial a......
  • Opinion of Advocate General Collins delivered on 9 February 2023.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 9 February 2023
    ...2008, Jäger (C‑256/06, EU:C:2008:20), apartado 35. 14 Véanse, en este sentido, las sentencias de 19 de noviembre de 2009, Comisión/Italia (C‑540/07, EU:C:2009:717), apartado 66, y de 5 de mayo de 2011, Comisión/Portugal (C‑267/09, EU:C:2011:273), apartado 15 Véase, en este sentido, la sente......
  • Request a trial to view additional results
5 cases
  • Opinion of Advocate General Collins delivered on 9 February 2023.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 9 February 2023
    ...2008, Jäger (C‑256/06, EU:C:2008:20), apartado 35. 14 Véanse, en este sentido, las sentencias de 19 de noviembre de 2009, Comisión/Italia (C‑540/07, EU:C:2009:717), apartado 66, y de 5 de mayo de 2011, Comisión/Portugal (C‑267/09, EU:C:2011:273), apartado 15 Véase, en este sentido, la sente......
  • X GmbH contra Finanzamt Stuttgart - Körperschaften.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 5 June 2018
    ...de dicho motivo con la prevención del fraude fiscal, véanse, en particular, las sentencias de 19 de noviembre de 2009, Comisión/Italia (C‑540/07, EU:C:2009:717), apartado 54, de 28 de octubre de 2010, Établissements Rimbaud (C‑72/09, EU:C:2010:645), apartado 34, y de 24 de noviembre de 2016......
  • European Commission v Portuguese Republic.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 7 April 2011
    ...C‑478/98, Rec. p. I‑7587, point 39, et, s’agissant de la lutte contre la fraude fiscale, arrêt du 19 novembre 2009, Commission/Italie, C‑540/07, Rec. p. I‑10983, point 55). 61 Encore faut-il cependant que la restriction à la libre circulation des capitaux soit propre à garantir la réalisati......
  • European Commission v Federal Republic of Germany.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 20 October 2011
    ...I‑11673, apartado 36; de 8 de noviembre de 2007, Amurta, C‑379/05, Rec. p. I‑9569, apartado 16; de 19 de noviembre de 2009, Comisión/Italia, C‑540/07, Rec. p. I‑10983, apartado 28, y de 3 de junio de 2010, Comisión/España, C‑487/08, Rec. p. I‑0000, apartado 37). 45 Corresponde en especial a......
  • Request a trial to view additional results
3 books & journal articles
  • Tax neutrality of corporate financing: a European Law perspective
    • European Union
    • European Tax Studies No. 1-2010, March 2010
    • 1 March 2010
    ...ent equal t o t hat given t o t he resident beneficiary shareholding com pany. I n t his way, t he freedom of 71 ECJ 19 Novem ber 2009, case C- 540/ 07 , Com m ission vs. Republic of I t aly. 72 ECJ 14 Decem ber 2006, case C- 170/ 05 , Denkavit I nt ernat ionaal BV, Denkavit France SARL aga......
  • La delimitación del ámbito de aplicación objetivo de la directiva 2009/133/CE
    • European Union
    • Fiscalidad de las reorganizaciones empresariales en la Unión Europea. Estudio de la Directiva Fiscal de Fusiones
    • 1 January 2021
    ...En este sentido, vid. , entre otras, las SSTJUE de 21 de febrero de 2013, asunto C-123/11, A Oy , ap. 29; de 19 de noviembre de 2009, asunto C-540/07, Comisión Europea v. Italia , ap. 28; de 11 de octubre de 2007, asunto C-451/05, Européenne et Luxembourgeoise d’investissements SA (ELISA) ,......
  • Bridging the Widening Gap between the EU Treaties and the Agreement on the European Economic Area
    • European Union
    • European Law Journal No. 18-6, November 2012
    • 1 November 2012
    ...Commission v Portugal, judgment of 7.4.2011 (nyr), para 68;and C-10/10, Commission v Austria, judgment of 16.6.2011 (nyr), para 42.38 Case C-540/07, Commission v Italy [2009] ECR I-10983, followed up by cases such as C-72/09, Étab-lissements Rimbaud SA v Directeur général des impôts and Dir......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT