European Commission v Kingdom of the Netherlands.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:551
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-279/08
Date08 September 2011
Celex Number62008CJ0279
Procedure TypeRecurso de anulación

Affaire C-279/08 P

Commission européenne

contre

Royaume des Pays-Bas

«Pourvoi — Aide d’État — Article 87, paragraphe 1, CE — Système d’échange des droits d’émission pour les oxydes d’azote — Qualification de la mesure nationale d’aide d’État — Décision déclarant l’aide compatible avec le marché commun — Notion de ‘sélectivité’ — Avantage financé au moyen de ressources d’État — Protection de l’environnement — Obligation de motivation — Recevabilité»

Sommaire de l'arrêt

1. Recours en annulation — Actes susceptibles de recours — Notion — Actes produisant des effets juridiques obligatoires — Décision qualifiant une mesure notifiée d'aide d'État et déclarant celle-ci compatible avec le marché commun — Inclusion

(Art. 87 CE, 88 CE et 230 CE; règlement du Conseil nº 659/1999)

2. Aides accordées par les États — Notion — Caractère sélectif de la mesure

(Art. 87, § 1, CE)

3. Aides accordées par les États — Notion — Caractère sélectif de la mesure

(Art. 87, § 1, CE)

4. Aides accordées par les États — Notion — Appréciation selon le critère des conditions normales de marché

(Art. 87, § 1, CE)

5. Aides accordées par les États — Notion — Aides provenant de ressources de l'État

(Art. 87, § 1, CE)

6. Aides accordées par les États — Décision de la Commission qualifiant une mesure d’aide d'État — Obligation de motivation — Portée

(Art. 87, § 1, CE et 296 TFUE)

1. Si la Commission constate, après l’examen préliminaire, que la mesure notifiée, pour autant qu’elle entre dans le champ d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE, ne suscite pas de doutes quant à sa compatibilité avec le marché commun, elle adopte une décision de ne pas soulever d’objections au titre de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 659/1999, relatif à l'application de l'article 88 CE. Une telle décision entraîne, notamment, l’application de la procédure prévue pour les régimes d’aides existants par ledit règlement et, en particulier, celle des articles 17 à 19 et 21 de celui-ci, lequel impose à l’État membre l’obligation de communiquer un rapport annuel sur tous les régimes d’aides existants.

Partant, une qualification erronée d’une mesure comme aide d’État a des conséquences juridiques pour l’État membre notifiant en ce que cette mesure est soumise à une surveillance constante de la Commission et à un contrôle périodique de sa part, de sorte que cet État membre jouit d’une marge de manœuvre restreinte dans la mise en œuvre de la mesure notifiée.

Il en découle nécessairement qu’une décision fondée sur les paragraphes 1 et 3 de l’article 87 CE, qui, tout en qualifiant la mesure en cause d’aide d’État, la déclare compatible avec le marché commun, doit être regardée comme un acte attaquable en vertu de l’article 230 CE. Une telle décision de compatibilité au sens de l’article 87, paragraphes 1 et 3, CE a également un caractère définitif et ne constitue pas une mesure préparatoire.

(cf. points 40-42)

2. Afin de prouver qu'une mesure susceptible d'être qualifiée d'aide d'État s’applique de manière sélective à certaines entreprises ou à certaines productions, il incombe à la Commission de démontrer que celle-ci introduit des différenciations entre des entreprises se trouvant, au regard de l’objectif de la mesure en cause, dans une situation factuelle et juridique comparable.

À cet égard, dès lors que la Commission constate, dans sa décision, que certaines entreprises bénéficiant d'une mesure qualifiée d'aide d'État relèvent d'un groupe spécifique de grandes entreprises industrielles actives dans le commerce entre États membres et bénéficient d'un avantage qui n'est pas disponible pour d'autres entreprises, consistant dans le fait de pouvoir monétiser la valeur économique des réductions d’émissions qu’elles réalisent, en les convertissant en droits d’émission négociables, ou, le cas échéant, d’éviter le risque de devoir payer des amendes lorsqu’elles dépassent la limite d’émissions d'oxydes d'azote fixée par les autorités nationales, en achetant de tels droits d’émission auprès d’autres entreprises relevant de la mesure étatique concernée, alors que les autres entreprises n’ont pas ces possibilités, la Commission n'est pas tenue de détailler davantage sa décision. Dans le cas d’un programme d’aides, elle peut se borner à étudier les caractéristiques du programme en cause pour apprécier, dans les motifs de sa décision, si, en raison des modalités que ce programme prévoit, celui-ci assure un avantage sensible aux bénéficiaires par rapport à leurs concurrents et est de nature à profiter essentiellement à des entreprises qui participent aux échanges entre États.

(cf. points 62-63, 65)

3. L’article 87, paragraphe 1, CE ne distingue pas selon les causes ou les objectifs des interventions étatiques, mais les définit en fonction de leurs effets. Même si la protection de l’environnement constitue l’un des objectifs essentiels de la Communauté européenne, la nécessité de prendre en compte cet objectif ne justifie pas l’exclusion de mesures sélectives du champ d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE, la prise en compte des objectifs environnementaux pouvant, en tout état de cause, intervenir utilement lors de l’appréciation de la compatibilité de la mesure d’aide d’État avec le marché commun conformément à l’article 87, paragraphe 3, CE.

S'agissant, en particulier, d'une mesure mettant en place un système d'échange de droits d'émission d'oxydes d'azote, qui comporte une différenciation entre entreprises fondée sur un critère quantitatif, tel le critère de la capacité thermique totale installée des entreprises, les émissions importantes d'oxyde d'azote des entreprises relevant de la mesure concernée et une norme spécifique de réduction qui pèse sur celles-ci ne suffisent pas à faire échapper cette mesure à la qualification de mesures sélectives au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, dès lors que la différenciation entre les entreprises ne saurait être considérée comme inhérente à un régime visant à réduire la pollution d’origine industrielle et, partant, justifiée du seul fait de considérations d’ordre écologique. Dès lors qu'un tel critère de distinction ne se justifie ni par la nature ni par l’économie générale de la mesure concernée, il ne saurait soustraire à la mesure en cause son caractère d’aide d’État.

À cet égard, il incombe à l'État membre, qui a introduit une telle différenciation entre les entreprises, de démontrer qu'elle est effectivement justifiée par la nature et l'économie du système en cause.

(cf. points 75-78)

4. Sont considérées comme des aides d'État les interventions qui, sous quelque forme que ce soit, sont susceptibles de favoriser directement ou indirectement des entreprises ou qui sont à considérer comme un avantage économique que l’entreprise bénéficiaire n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché.

Tel est le cas d'un système dans lequel seules certaines entreprises détiennent la possibilité de pouvoir monétiser la valeur économique des réductions d’émissions d'oxydes d'azote qu’elles réalisent, en les convertissant en droits d’émission négociables, ou, le cas échéant, d’éviter le risque de devoir payer des amendes lorsqu’elles dépassent la limite d’émissions d'oxydes d'azote fixée par les autorités nationales, en achetant de tels droits d’émission auprès d’autres entreprises relevant de la mesure étatique concernée, dès lors que la négociabilité des droits d’émission d'oxydes d'azote dépend avant tout du fait que l’État, d’une part, autorise la vente de ces droits et, d’autre part, permet aux entreprises ayant émis un surplus d'oxydes d'azote d’acquérir auprès d’autres entreprises les droits d’émission manquants, consentant de cette manière à la création d’un marché pour ces droits.

La négociabilité de ces droits ne saurait être considérée comme constituant une contrepartie, au prix du marché, des efforts entrepris par les entreprises relevant de la mesure en cause pour restreindre leurs émissions d'oxydes d'azote, dès lors que les coûts de réduction desdites émissions relèvent des charges qui grèvent normalement le budget de l’entreprise.

Par ailleurs, la faculté, pour ces entreprises, de choisir entre les coûts de l’acquisition de droits d’émission et les coûts liés aux mesures visant à réduire les émissions d'oxydes d'azote constitue un avantage pour celles-ci. En outre, la faculté, pour les entreprises visées par la mesure en cause, de négocier tous les droits d’émission et pas seulement les crédits dégagés en fin d’année par la différence positive entre l’émission autorisée et l’émission avérée constitue un avantage supplémentaire pour ces entreprises. En effet, ces dernières peuvent disposer de liquidités en vendant les droits d’émission avant la réalisation des conditions pour leur allocation définitive, indépendamment du fait qu’un plafond leur est applicable et que les entreprises dépassant la norme d’émission prescrite doivent compenser l’excédent l’année suivante.

(cf. points 87-91)

5. Pour que des avantages puissent être qualifiés d’aides au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, ils doivent, d’une part, être accordés directement ou indirectement au moyen de ressources d’État et, d’autre part, être imputables à l’État.

Tel est le cas d'une mesure étatique mettant gratuitement à la disposition de certaines entreprises des droits d’émission d'oxydes d'azote au lieu de les vendre ou de les mettre aux enchères, et instaurant un régime prévoyant la possibilité de négocier ces droits sur le marché, même s’ils sont liés à un plafond maximal, tout en octroyant aux entreprises relevant de la mesure en cause la possibilité d’acheter des droits d’émission pour éviter le paiement d’amendes. La négociabilité de droits d’émission d'oxydes d'azote représente un avantage consenti par le législateur national à certaines entreprises, qui peut impliquer une charge supplémentaire pour les pouvoirs publics, sous la forme notamment d’une exonération de...

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