A Oy.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2013:84
Date21 February 2013
Celex Number62011CJ0123
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑123/11
62011CJ0123

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

21 février 2013 ( *1 )

«Liberté d’établissement — Article 49 TFUE — Législation fiscale — Fusion d’une société mère établie dans un État membre avec une filiale établie dans un autre État membre — Déductibilité par la société mère des pertes de la filiale résultant des activités de cette dernière — Exclusion pour les filiales non-résidentes»

Dans l’affaire C‑123/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Korkein hallinto-oikeus (Finlande), par décision du 7 mars 2011, parvenue à la Cour le 9 mars 2011, dans la procédure engagée par

A Oy,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, faisant fonction de président de la quatrième chambre, M. J.-C. Bonichot (rapporteur), MmesC. Toader, A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 7 juin 2012,

considérant les observations présentées:

pour A Oy, par Me A. Blomqvist, asianajaja,

pour le gouvernement finlandais, par Mme M. Pere, en qualité d’agent,

pour le gouvernement allemand, par Mme K. Petersen, en qualité d’agent,

pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues et J.-S. Pilczer, en qualité d’agents,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. M. Santoro, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement suédois, par Mmes A. Falk et S. Johannesson, en qualité d’agents,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme C. Murrell, en qualité d’agent, assistée de Mes K. Bacon et R. Hill, barristers,

pour la Commission européenne, par MM. R. Lyal et I. Koskinen, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 19 juillet 2012,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 49 TFUE et 54 TFUE.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure engagée par A Oy (ci-après «A»), société de droit finlandais, à l’encontre de la décision de la keskusverolautakunta (commission fiscale centrale) selon laquelle A ne pourrait, dans le cadre d’une fusion avec une filiale suédoise, déduire fiscalement les pertes de cette dernière.

Le cadre juridique

Le droit international

3

L’article 7, paragraphe 1, de la convention des pays nordiques relative à la prévention de la double imposition en matière d’imposition du revenu et du patrimoine, conclue à Helsinki le 23 septembre 1996 (SopS 26/1997) stipule:

«Les bénéfices d’une entreprise d’un État contractant ne sont imposables que dans cet État, à moins que l’entreprise n’exerce son activité dans l’autre État contractant par l’intermédiaire d’un établissement stable qui y est situé. Si l’entreprise exerce son activité d’une telle façon, les bénéfices de l’entreprise sont imposables dans l’autre État mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables à cet établissement stable.»

Le droit finlandais

4

La loi 360/1968 sur l’imposition des revenus provenant d’activités économiques [Laki elinkeinotulon verottamisesta (360/1968)], qui visait notamment à transposer la directive 2009/133/CE du Conseil, du 19 octobre 2009, concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, scissions partielles, apports d’actifs et échanges d’actions intéressant des sociétés d’États membres différents, ainsi qu’au transfert du siège statutaire d’une SE ou d’une SCE d’un État membre à un autre (JO L 310, p. 34), précise le cadre juridique de la fusion/absorption des sociétés.

5

L’article 52 a, point 2, de cette loi définit la notion de fusion en ces termes:

«Par fusion on entend l’opération par laquelle:

[...]

2)

une société absorbée transfère, par sa dissolution sans liquidation, l’ensemble de son patrimoine, actif et passif, à la société absorbante qui détient l’intégralité des actions représentant le capital de la société absorbée ou à une société anonyme détenue intégralement par une telle société.»

6

La loi 1535/1992 relative à l’impôt sur le revenu [tuloverolaki (1535/1992)], du 30 décembre 1992 (ci-après la «loi relative à l’impôt sur le revenu») précise le régime fiscal des pertes des sociétés.

7

L’article 117 de cette loi prévoit que la perte constatée résultant de l’activité économique est déduite des revenus de l’activité économique des années suivantes.

8

L’article 119, paragraphes 1 et 2, de ladite loi précise:

«La perte résultant de l’exercice fiscal économique et agricole est déduite des résultats des activités économiques [...] pendant les dix exercices qui suivent au fur et à mesure où des revenus sont générés.

On entend par «perte résultant d’activités économiques» le résultat déficitaire calculé selon la [loi 360/1968 sur l’imposition des revenus provenant d’activités économiques] […]».

9

L’article 123, paragraphe 2, de cette même loi prévoit les conditions dans lesquelles la société absorbante peut reprendre fiscalement les pertes de la société absorbée dans les termes suivants:

«Après que des personnes morales ont fusionné [...], la personne morale absorbante a le droit de déduire de son revenu imposable la perte subie par la personne morale qui a été absorbée [...] de la manière décrite aux articles 119 et 120, si la personne morale absorbante ou ses actionnaires ou membres, ou la personne morale et ses actionnaires ou membres ensemble, possédaient dès le début de l’exercice déficitaire plus de la moitié des actions ou des parts de la personne morale absorbée ou scindée.»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

10

A est une entreprise finlandaise spécialisée dans le commerce de meubles. A possède une filiale en Suède (ci-après «B») dont elle détient la totalité du capital et qui exerce en Suède une activité similaire dans trois locaux commerciaux qu’elle loue. A ne dispose pas elle-même d’autres filiales ou succursales en Suède.

11

À la suite de pertes commerciales, B a fermé ses trois points de vente, l’un au mois de décembre 2007, les deux autres au mois de mars 2008. B n’avait pas l’intention de poursuivre d’activités commerciales en Suède, mais elle demeurait tenue par des baux de location à long terme de deux locaux commerciaux. Son déficit s’est élevé à 44,8 millions de SEK pour la période allant de 2001 à 2007.

12

À la suite de la cessation des activités de B, A a envisagé de procéder à une fusion avec cette filiale. Cette opération serait justifiée d’un point de vue économique et permettrait notamment de transférer à A les baux conclus par B. En outre, il s’agirait d’une procédure transparente et facile à mettre en œuvre, qui permettrait de simplifier la structure du groupe.

13

Au terme de cette opération, les ressources, dettes et obligations résiduelles de B devraient être transférées à A et la société mère ne disposerait plus de filiale ni d’établissement stable en Suède.

14

A a présenté à la keskusverolautakunta une demande de décision préalable portant sur la question de savoir si, une fois cette opération réalisée, elle pourrait déduire les pertes de B conformément à l’article 123, paragraphe 2, de la loi relative à l’impôt sur le revenu.

15

Par sa décision préalable du 25 mars 2009, la keskusverolautakunta a répondu par la négative au motif que les pertes de B ont été constatées en application de la législation fiscale suédoise. Elle estime que ces pertes ne peuvent, dès lors, relever du champ d’application de l’article 119 de la loi relative à l’impôt sur le revenu.

16

A a contesté cette décision devant le Korkein hallinto-oikeus (Cour administrative suprême) en se prévalant notamment de la liberté d’établissement.

17

La juridiction de renvoi constate que, dans l’hypothèse où une société résidente absorbe une société finlandaise, elle peut déduire fiscalement les pertes de cette dernière dans les conditions énoncées aux articles 119 et 123 de la loi relative à l’impôt sur le revenu, sous réserve que l’opération n’ait pas été réalisée dans le seul but d’obtenir un avantage fiscal.

18

Cette juridiction souligne que, en revanche, la loi finlandaise ne donne pas d’indication sur les conditions dans lesquelles il pourrait être procédé à cette déduction lorsque la société absorbée est située dans un autre État membre.

19

Ladite juridiction se demande, dès lors, si la législation finlandaise ne contient pas une restriction à la liberté d’établissement et, dans l’affirmative, si celle-ci peut être considérée comme justifiée par les raisons d’intérêt général invoquées par les autorités finlandaises, tirées de la nécessité pour les États membres de préserver une répartition équilibrée de leur pouvoir d’imposition et de se prémunir contre les risques de double utilisation des pertes et d’évasion fiscale.

20

C’est dans ces conditions que le Korkein hallinto-oikeus a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions suivantes:

«1)

Les articles 49 TFUE et 54 TFUE exigent-ils qu’une société absorbante puisse, dans son imposition, déduire les pertes résultant d’une activité exercée, pendant les années qui ont précédé la fusion, dans un autre État membre par la société absorbée, qui y était établie, dès lors que la société absorbante ne dispose pas d’un établissement fixe dans l’État de résidence de la...

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