Opinion of Advocate General Wathelet delivered on 28 February 2018.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:125
Docket NumberC-618/16
Celex Number62016CC0618
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeCuestión prejudicial - sobreseimiento
Date28 February 2018
62016CC0618

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MELCHIOR WATHELET

présentées le 28 février 2018 ( 1 )

Affaire C‑618/16

Rafal Prefeta

contre

Secretary of State for Work and Pensions

[demande de décision préjudicielle formée par l’Upper Tribunal (Administrative Appeals Chamber) [tribunal supérieur (chambre des appels administratifs), Royaume-Uni]]

« Renvoi préjudiciel – Libre circulation des personnes – Article 45 TFUE – Chapitre 2 de l’annexe XII de l’acte relatif aux conditions d’adhésion de 2003 – Possibilité pour le Royaume-Uni de déroger à l’article 7, paragraphe 2, du règlement (UE) no 492/2011 et à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2004/38/CE – Dérogations visant un ressortissant polonais n’ayant pas accompli une période de douze mois de travail enregistré dans l’État membre d’accueil »

I. Introduction

1.

La présente demande de décision préjudicielle, déposée au greffe de la Cour le 29 novembre 2016 par l’Upper Tribunal (Administrative Appeals Chamber) [tribunal supérieur (chambre des appels administratifs), Royaume-Uni], porte sur l’interprétation tout d’abord de l’annexe XII de l’acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne ( 2 ) (ci-après l’« acte d’adhésion de 2003 »), ensuite de l’article 7, paragraphe 2, du règlement (UE) no 492/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union ( 3 ), et enfin de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE ( 4 ).

2.

Cette demande de décision préjudicielle s’inscrit dans le cadre d’un litige opposant M. Rafal Prefeta, ressortissant polonais, au Secretary of State for Work and Pensions (secrétaire d’État au travail et aux retraites, Royaume-Uni) (ci-après le « SSWP »), au sujet du refus de ce dernier d’accorder à M. Prefeta une allocation complémentaire et de soutien à l’emploi, liée au revenu (income-related Employment and Support Allowance)(ci-après l’« allocation »).

3.

La décision du SSWP refusant à M. Prefeta l’accès à l’allocation était basée sur le fait qu’il n’avait pas le statut de travailleur et, partant, le droit corollaire de séjour, une des conditions d’éligibilité à l’allocation.

4.

En effet, les mesures nationales adoptées sur la base des dispositions dérogatoires prévues au chapitre 2 de l’annexe XII de l’acte d’adhésion de 2003 empêchaient les ressortissants polonais n’ayant pas travaillé pendant une période ininterrompue de douze mois en tant que travailleur enregistré conformément aux dispositions nationales de se prévaloir des dispositions nationales transposant l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2004/38 aux fins de conserver leur statut de « travailleur » et le droit de séjour conféré par ce statut.

5.

La demande de décision préjudicielle porte sur les conditions dans lesquelles les dispositions du chapitre 2 de l’annexe XII de l’acte d’adhésion de 2003, qui dérogent à l’article 45 TFUE et à l’article 56, premier alinéa, TFUE, pendant une période provisoire, autorisent les États membres actuels ( 5 ) à exclure les ressortissants polonais du bénéfice de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011 et de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2004/38 et, par conséquent, autorisent des limitations au droit d’accès des ressortissants polonais à l’allocation.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1. L’acte d’adhésion de 2003

6.

L’acte d’adhésion de 2003 fixe les conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie, de la République slovaque et prévoit des adaptations des traités.

7.

Aux termes de la première partie, article 1er, deuxième et cinquième tirets, de cet acte :

« […]

l’expression “États membres actuels” vise le Royaume de Belgique, le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, l’Irlande, la République italienne, le Grand-Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, la République d’Autriche, la République portugaise, la République de Finlande, le Royaume de Suède, et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ;

[…]

l’expression “nouveaux États membres” vise la République tchèque, la République d’Estonie, la République de Chypre, la République de Lettonie, la République de Lituanie, la République de Hongrie, la République de Malte, la République de Pologne, la République de Slovénie et la République slovaque ;

[…] »

8.

La quatrième partie de l’acte d’adhésion de 2003 contient les dispositions temporaires applicables aux « nouveaux États membres ». Sous le titre I de cette partie, l’article 24 dudit acte dispose :

« Les mesures énumérées dans la liste figurant aux annexes V, VI, VII, VIII, IX, X, XI, XII, XIII et XIV du présent acte sont applicables en ce qui concerne les nouveaux États membres dans les conditions définies par lesdites annexes. »

9.

L’annexe XII de l’acte d’adhésion de 2003 est intitulée « Liste visée à l’article 24 de l’acte d’adhésion : Pologne ». Au chapitre 2 de cette annexe, relatif à la libre circulation des personnes, les paragraphes 1, 2, 5 et 9 sont libellés comme suit :

« 1. L’article [45] et l’article [56], premier alinéa, [TFUE] ne s’appliquent pleinement que sous réserve des dispositions transitoires prévues aux paragraphes 2 à 14 pour ce qui est de la libre circulation des travailleurs et de la libre prestation de services impliquant une circulation temporaire de travailleurs, telle qu’elle est définie à l’article 1er de la directive 96/71/CE, entre la Pologne, d’une part, et la Belgique, la République tchèque, le Danemark, l’Allemagne, l’Estonie, la Grèce, l’Espagne, la France, l’Irlande, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, la Hongrie, les Pays-Bas, l’Autriche, le Portugal, la Slovénie, la Slovaquie, la Finlande, la Suède et le Royaume-Uni, d’autre part.

2. Par dérogation aux articles 1er à 6 du règlement (CEE) no 1612/68 [règlement du Conseil du 15 octobre 1968 relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté (JO 1968, L 257, p. 2)] et jusqu’à la fin de la période de deux ans suivant la date de l’adhésion, les États membres actuels appliqueront des mesures nationales ou les mesures résultant d’accords bilatéraux qui réglementent l’accès des ressortissants polonais à leur marché du travail. Les États membres actuels peuvent continuer à appliquer ces mesures jusqu’à la fin de la période de cinq ans suivant la date de l’adhésion.

Les ressortissants polonais qui travaillent légalement dans un État membre actuel à la date de l’adhésion et qui sont admis sur le marché du travail de cet État membre pour une période ininterrompue égale ou supérieure à [douze] mois pourront bénéficier de l’accès au marché du travail de cet État membre, mais non au marché du travail d’autres États membres qui appliquent des mesures nationales.

Les ressortissants polonais admis sur le marché du travail d’un État membre actuel à la suite de l’adhésion pendant une période ininterrompue égale ou supérieure à [douze] mois bénéficient également des mêmes droits. Les ressortissants polonais visés aux deuxième et troisième alinéas ci-dessus cessent de bénéficier des droits prévus dans lesdits alinéas s’ils quittent volontairement le marché du travail de l’État membre actuel en question.

Les ressortissants polonais qui travaillent légalement dans un État membre actuel à la date de l’adhésion, ou pendant une période où des mesures nationales sont appliquées, et qui sont admis sur le marché du travail de cet État membre pour une période inférieure à [douze] mois ne bénéficient pas de ces droits.

[…]

5. Un État membre ayant maintenu des mesures nationales ou des mesures résultant d’accords bilatéraux à la fin de la période de cinq ans visée au paragraphe 2 peut les proroger jusqu’à la fin de la période de sept ans suivant la date de l’adhésion après en avoir averti la Commission si son marché du travail subit ou est menacé de subir des perturbations graves. À défaut de cette notification, les articles 1er à 6 du règlement no 1612/68 s’appliquent.

[…]

9. Dans la mesure où certaines dispositions de la directive 68/360/CEE [directive du Conseil du 15 octobre 1968 relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des travailleurs des États membres et de leur famille à l’intérieur de la Communauté (JO 1968, L 257, p. 13)] ne peuvent pas être dissociées de celles du règlement no 1612/68 dont l’application est différée en vertu des paragraphes 2 à 5 et 7 et 8, la Pologne et les États membres actuels peuvent déroger à ces dispositions dans la mesure nécessaire à l’application des paragraphes 2 à 5 et 7 et 8. »

2. Le règlement no 492/2011

10.

Le règlement no 492/2011 a abrogé et remplacé, avec...

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