VB Pénzügyi Lízing Zrt. v Ferenc Schneider.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2010:401
Docket NumberC-137/08
Celex Number62008CC0137
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date06 July 2010

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME VERICA TRSTENJAK

présentées le 6 juillet 2010 1(1)

Affaire C‑137/08

VB Pénzügyi Lízing Zrt.

contre

Ferenc Schneider

[demande de décision préjudicielle formée par le Budapesti II. és III. Kerületi Bíróság (Hongrie)]

«Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Compétence d’interprétation de la Cour – Pouvoir et obligation du juge national d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause attributive de juridiction – Critères d’appréciation – Principes de droit communautaire de l’équivalence et de l’effectivité – Principe de l’autonomie des parties dans la procédure civile nationale – Principes de la procédure préjudicielle»





I – Introduction

1. La présente affaire trouve son origine dans une demande de décision préjudicielle du Budapesti II. és III. Kerületi Bíróság (tribunal des deuxième et troisième arrondissements de Budapest, Hongrie, ci-après la «juridiction de renvoi») fondée sur l’article 234 CE (2), par laquelle cette juridiction a saisi la Cour d’une série de questions relatives à l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (3).

2. La demande de décision préjudicielle s’inscrit dans le cadre d’un litige opposant VB Pénzügyi Lízing Zrt. (ci-après la «demanderesse au principal») à M. Ferenc Schneider (ci-après le «défendeur au principal») au sujet du remboursement d’un prêt. Elle pose, notamment, la question de savoir quel rôle joue la Cour dans le cadre de la garantie de l’application uniforme, dans l’ensemble des États membres de l’Union européenne, du niveau de protection des droits des consommateurs prévu par la directive 93/13. Il convient de répondre à cette question à la lumière de la jurisprudence de la Cour et, en particulier, de son arrêt du 4 juin 2009 dans l’affaire Pannon GSM (C-243/08) (4).

II – Cadre juridique

A – Le droit communautaire

1. Le statut de la Cour de justice de l’Union européenne

3. L’article 23 du protocole sur le statut de la Cour de justice dispose:

«Dans les cas visés à l’article 35, paragraphe 1, du traité UE, à l’article 234 du traité CE et à l’article 150 du traité CEEA, la décision de la juridiction nationale qui suspend la procédure et saisit la Cour est notifiée à celle-ci à la diligence de cette juridiction nationale. Cette décision est ensuite notifiée par les soins du greffier de la Cour aux parties en cause, aux États membres et à la Commission, ainsi qu’au Conseil ou à la Banque centrale européenne, si l’acte dont la validité ou l’interprétation est contestée émane de ceux-ci, et au Parlement européen et au Conseil, si l’acte dont la validité ou l’interprétation est contestée a été adopté conjointement par ces deux institutions.

Dans un délai de deux mois à compter de cette dernière notification, les parties, les États membres, la Commission et, le cas échéant, le Parlement européen, le Conseil et la Banque centrale européenne ont le droit de déposer devant la Cour des mémoires ou des observations écrites.

Dans les cas visés à l’article 234 du traité CE, la décision de la juridiction nationale est, en outre, notifiée par les soins du greffier de la Cour aux États parties à l’accord sur l’Espace économique européen, autres que les États membres, ainsi qu’à l’Autorité de surveillance AELE visée par ledit accord qui, dans un délai de deux mois à compter de la notification, et lorsque l’un des domaines d’application de l’accord est concerné, peuvent déposer devant la Cour des mémoires ou des observations écrites.»

4. L’article 23 du statut de la Cour a été modifié avec l’entrée en vigueur, le 1er décembre 2009, du traité de Lisbonne modifiant le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne (5). Toutefois, ces modifications n’ont apporté que quelques précisions en ce qui concerne la procédure préjudicielle qui est désormais régie par l’article 267 TFUE.

2. La directive 93/13

5. Suivant l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 93/13, cette dernière a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur.

6. L’article 3, paragraphe 1, de la directive dispose:

«Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.»

7. En vertu de l’article 6, paragraphe 1, de cette même directive:

«Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives.»

8. Selon l’article 7, paragraphe 1, de la directive:

«Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel.»

B – Le droit national

9. Il ressort de la décision de renvoi que le législateur hongrois a transposé la directive 93/13 en plusieurs étapes. Les dispositions en vigueur sont le résultat des modifications apportées par la loi n° III de 2006 qui est, entre autres, à l’origine des articles 205/A, 205/B et 209 à 209/B du code civil hongrois (Polgári törvénykönyv, ci-après le «code civil»).

10. L’article 205/A du code civil dispose, en son paragraphe 1, que toute clause contractuelle qu’une partie a établie par avance, unilatéralement et sans la participation de l’autre partie, aux fins de la conclusion de contrats multiples, et que les parties n’ont pas négociée individuellement doit être considérée comme une clause contractuelle générale.

11. Selon l’article 205/A, paragraphe 2, du code civil, la preuve de ce que la clause contractuelle générale a été négociée par les parties individuellement est apportée par la partie qui invoque ladite clause. Cette disposition est également applicable si les parties sont en désaccord sur le point de savoir si la clause contractuelle établie par avance et unilatéralement dans le contrat conclu avec le consommateur par le cocontractant de celui-ci a été individuellement négociée.

12. En vertu de l’article 205/A, paragraphe 3, du code civil, le caractère de clause contractuelle générale d’une stipulation n’est pas influencé par la portée, la forme ou le libellé de celle-ci, ni par le fait qu’elle soit incluse dans le contrat lui-même ou dans un acte séparé.

13. L’article 205/B du code civil dispose, en son paragraphe 1, qu’une clause contractuelle générale ne devient un élément du contrat que si la partie qui s’en prévaut a donné la possibilité à l’autre partie de prendre connaissance de son contenu et si cette dernière l’a acceptée expressément ou implicitement.

14. Selon l’article 205/B, paragraphe 2, du code civil, l’autre partie doit être spécialement informée de l’existence d’une clause contractuelle générale qui déroge substantiellement à la pratique contractuelle habituelle ou aux règles applicables au contrat, ou s’écarte d’une stipulation appliquée antérieurement entre les parties. Une telle clause ne devient un élément du contrat que si l’autre partie – après que son attention a été spécialement attirée dessus – l’a acceptée expressément.

15. L’article 205/C du code civil dispose que, en cas d’incompatibilité entre la clause contractuelle générale et une autre clause du contrat, c’est cette dernière qui est considérée comme faisant partie dudit contrat.

16. En vertu de l’article 209, paragraphe 1, du code civil, une clause contractuelle générale, ou une clause d’un contrat conclu avec un consommateur qui n’a pas été individuellement négociée, est abusive lorsqu’elle prévoit pour les parties, unilatéralement et sans justification, et en violation des exigences de la bonne foi et de l’honnêteté, des droits et des obligations qui désavantagent le cocontractant de la partie qui a imposé la clause en question.

17. Le paragraphe 2 du même article prévoit qu’il faut, au moment d’apprécier la nature abusive de la clause, examiner toutes les circonstances de la conclusion du contrat qui ont abouti à l’accord, et aussi la nature des services prévus et les rapports de la clause concernée avec les autres stipulations du contrat ou avec d’autres contrats.

18. En vertu de l’article 209, paragraphe 5, du code civil, une clause contractuelle ne peut pas être considérée comme abusive si elle est imposée par la loi ou introduite pour satisfaire à une disposition de celle-ci.

19. L’article 209/A du code civil prévoit, en son paragraphe 1, qu’une clause abusive devenue un élément d’un contrat en tant que clause contractuelle générale peut être contestée par la partie qu’elle lèse.

20. Selon le paragraphe 2 de cet article, une clause abusive qui est établie par avance et unilatéralement, en tant que clause contractuelle générale, dans un contrat conclu avec un consommateur, par le cocontractant de celui-ci, et qui n’a pas été négociée individuellement est nulle. La nullité ne peut être invoquée que dans l’intérêt du consommateur.

21. En ce qui concerne la procédure de demande de décision préjudicielle, le législateur hongrois a, en adoptant la loi n° XXX de 2003, modifié le code hongrois de procédure civile (Polgári perrendtartás, ci-après le «code de procédure civile»). En conséquence de cette modification, l’article 155/A, paragraphe 2, dudit code prévoit que les juridictions hongroises qui notifient à la Cour des...

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