J. N. v Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date15 February 2016
62015CJ0601

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

15 février 2016 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Procédure préjudicielle d’urgence — Normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale — Directive 2008/115/CE — Séjour régulier — Directive 2013/32/UEArticle 9 — Droit de rester dans un État membre — Directive 2013/33/UE — Article 8, paragraphe 3, premier alinéa, sous e) — Placement en rétention — Protection de la sécurité nationale ou de l’ordre public — Validité — Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne — Articles 6 et 52 — Limitation — Proportionnalité»

Dans l’affaire C‑601/15 PPU,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas), par décision du 17 novembre 2015, parvenue à la Cour le même jour, dans la procédure

J. N.

contre

Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, M. A. Tizzano, vice-président, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. T. von Danwitz (rapporteur), J. L. da Cruz Vilaça, Mme C. Toader, MM. D. Šváby et C. Lycourgos, présidents de chambre, M. E. Juhász, Mmes M. Berger, A. Prechal, MM. E. Jarašiūnas, C. G. Fernlund, C. Vajda et Mme K. Jürimäe, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 janvier 2016,

considérant les observations présentées:

pour M. N., par Mes S. Thelosen et S. Pijl, advocaten,

pour le Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, par M. D. Kuiper, en qualité d’agent,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. Noort et M. Bulterman, en qualité d’agents,

pour le gouvernement belge, par M. S. Vanrie ainsi que par Mmes M. Jacobs et C. Pochet, en qualité d’agents,

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil ainsi que par Mme S. Šindelková, en qualité d’agents,

pour le gouvernement hellénique, par Mme M. Michelogiannaki, en qualité d’agent,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. S. Fiorentino, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement chypriote, par Mme A. Argyropoulou, en qualité d’agent,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour le Parlement européen, par MM. T. Lukácsi et R. van de Westelaken, en qualité d’agents,

pour le Conseil de l’Union européenne, par MM. M. Chavrier et F. Naert, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme M. Condou-Durande ainsi que par MM. H. Krämer et G. Wils, en qualité d’agents,

l’avocat général entendu,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur la validité de l’article 8, paragraphe 3, premier alinéa, sous e), de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (JO L 180, p. 96).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. N. au Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie (secrétaire d’État à la Sécurité et à la Justice, ci-après le «secrétaire d’État») au sujet de son placement en rétention.

Le cadre juridique

La CEDH

3

Sous l’intitulé «Droit à la liberté et à la sûreté», l’article 5, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la «CEDH»), dispose:

«Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales:

[...]

f)

s’il s’agit de l’arrestation ou de la détention régulières d’une personne pour l’empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d’expulsion ou d’extradition est en cours.»

La Charte

4

L’article 6 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte»), intitulé «Droit à la liberté et à la sûreté», dispose:

«Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté.»

5

Aux termes de l’article 52 de la Charte, intitulé «Portée et interprétation des droits et des principes»:

«1. Toute limitation de l’exercice des droits et libertés reconnus par la présente Charte doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel desdits droits et libertés. Dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui.

[...]

3. Dans la mesure où la présente Charte contient des droits correspondant à des droits garantis par la [CEDH], leur sens et leur portée sont les mêmes que ceux que leur confère ladite convention. Cette disposition ne fait pas obstacle à ce que le droit de l’Union accorde une protection plus étendue.

[...]

7. Les explications élaborées en vue de guider l’interprétation de la présente Charte sont dûment prises en considération par les juridictions de l’Union et des États membres.»

La directive 2008/115/CE

6

Le considérant 4 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO L 348, p. 98), énonce:

«Il est nécessaire de fixer des règles claires, transparentes et équitables afin de définir une politique de retour efficace, constituant un élément indispensable d’une politique migratoire bien gérée.»

7

L’article 3 de la directive 2008/115, intitulé «Définitions», dispose:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

[...]

2)

‘séjour irrégulier’: la présence sur le territoire d’un État membre d’un ressortissant d’un pays tiers qui ne remplit pas, ou ne remplit plus, les conditions d’entrée énoncées à l’article 5 du [règlement (CE) no 562/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (JO L 105, p. 1)], ou d’autres conditions d’entrée, de séjour ou de résidence dans cet État membre;

[...]

4)

‘décision de retour’: une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d’un ressortissant d’un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour;

[...]»

8

Aux termes de l’article 7 de la directive 2008/115, intitulé «Départ volontaire»:

«1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n’est accordé qu’à la suite d’une demande du ressortissant concerné d’un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande.

Le délai prévu au premier alinéa n’exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt.

2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d’une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée du séjour, l’existence d’enfants scolarisés et d’autres liens familiaux et sociaux.

3. Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire.

4. S’il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les États membres peuvent s’abstenir d’accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours.»

9

L’article 8 de cette directive, intitulé «Éloignement», dispose, à son paragraphe 1:

«Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n’a été accordé pour un départ volontaire conformément à l’article 7, paragraphe 4, ou si l’obligation de retour n’a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l’article 7.»

10

L’article 11 de la directive 2008/115, intitulé «Interdiction d’entrée», prévoit:

«1. Les décisions de retour sont assorties d’une interdiction d’entrée:

a)

si aucun délai n’a été accordé pour le départ volontaire, ou

[...]

2. La durée de l’interdiction d’entrée est fixée en tenant dûment compte de toutes les circonstances propres à chaque cas et ne dépasse pas cinq ans en principe. Elle peut cependant dépasser cinq ans si le ressortissant d’un pays tiers constitue une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale.

[...]»

La directive 2013/32/UE

11

L’article 2 de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (JO L 180, p. 60), intitulé «Définitions», dispose:

«Aux fins de la...

To continue reading

Request your trial
43 practice notes
  • G.S. and V.G. v Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 12 December 2019
    ...judgments of 11 June 2015, Zh. and O. (C‑554/13, EU:C:2015:377); of 24 June 2015, T. (C‑373/13, EU:C:2015:413); and of 15 February 2016, N. (C‑601/15 PPU, EU:C:2016:84), and from the limitation — apparent, in particular, from the judgment of 4 March 2010, Chakroun (C‑578/08, EU:C:2010:117) ......
  • X and Y v Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 26 September 2018
    ...the autonomy of EU law and that of the Court of Justice of the European Union (see, to that effect, judgments of 15 February 2016, N., C‑601/15 PPU, EU:C:2016:84, paragraph 47, and of 14 September 2017, K., C‑18/16, EU:C:2017:680, paragraph 50 and the case-law cited). According to the expla......
  • Spiegel Online GmbH contra Volker Beck.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 29 July 2019
    ...del Derecho de la Unión y del Tribunal de Justicia de la Unión Europea [véanse, por analogía, las sentencias de 15 de febrero de 2016, N., C‑601/15 PPU, EU:C:2016:84, apartado 47, y de 26 de septiembre de 2018, Staatssecretaris van Veiligheid en justitie (Efecto suspensivo del recurso de ap......
  • Conclusiones de la Abogado General Sra. J. Kokott, presentadas el 13 de junio de 2019.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 13 June 2019
    ...juin 2016, Lidl (C‑134/15, EU:C:2016:498, point 33), du 4 mai 2016, Pillbox 38 (C‑477/14, EU:C:2016:324, point 48), du 15 février 2016, N. (C‑601/15 PPU, EU:C:2016:84, point 54), du 22 janvier 2013, Sky Österreich (C‑283/11, EU:C:2013:28, point 50), du 8 juillet 2010, Afton Chemical (C‑343/......
  • Request a trial to view additional results
40 cases
1 books & journal articles
1 provisions

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT