PTC Therapeutics International Ltd v European Medicines Agency.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:23
Docket NumberC-175/18
Date22 January 2020
Celex Number62018CJ0175
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

22 janvier 2020 (*)

« Pourvoi – Accès aux documents des institutions, des organes ou organismes de l’Union – Règlement (CE) no 1049/2001 – Article 4, paragraphe 2, premier tiret – Exception relative à la protection des intérêts commerciaux – Article 4, paragraphe 3 – Protection du processus décisionnel – Documents soumis à l’Agence européenne des médicaments dans le cadre d’une demande d’autorisation de mise sur le marché d’un médicament à usage humain – Décision d’accorder l’accès aux documents à un tiers – Présomption générale de confidentialité – Absence d’obligation pour une institution, un organe ou un organisme de l’Union européenne d’appliquer une présomption générale de confidentialité »

Dans l’affaire C‑175/18 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 6 mars 2018,

PTC Therapeutics International Ltd, établie à Dublin (Irlande), représentée par MM. G. Castle, B. Kelly, Mme K. Ewert, solicitors, ainsi que par Mme C. Thomas, barrister, et Mme M. Demetriou, QC,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Agence européenne des médicaments (EMA), représentée initialement par MM. T. Jabłoński, S. Marino, S. Drosos, A. Spina et A. Rusanov, puis par MM. T. Jabłoński, S. Marino et S. Drosos, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

European Confederation of Pharmaceutical Entrepreneurs (Eucope), établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Mme S. Cowlishaw, solicitor, et M. D. Scannell, barrister,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. M. Vilaras (rapporteur), président de chambre, M. K. Lenaerts, président de la Cour, faisant fonction de juge de la quatrième chambre, MM. S. Rodin, D. Šváby et N. Piçarra, juges,

avocat général : M. G. Hogan,

greffier : M. M. Longar, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 mai 2019,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 11 septembre 2019,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, PTC Therapeutics International Ltd demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 5 février 2018, PTC Therapeutics International/EMA (T‑718/15, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2018:66), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision EMA/722323/2015 de l’Agence européenne des médicaments (EMA), du 25 novembre 2015, accordant à un tiers, en vertu du règlement (CE) nº 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), l’accès à un document contenant des données soumises dans le cadre d’une demande d’autorisation de mise sur le marché du médicament Translarna (ci-après la « décision litigieuse »).

Le cadre juridique

Le droit international

2 L’article 39, paragraphe 3, de l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce figurant à l’annexe 1 C de l’accord de Marrakech instituant l’Organisation mondiale du commerce et approuvé au nom de la Communauté européenne par la décision 94/800/CE du Conseil, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO 1994, L 336, p. 1) (ci-après l’« accord ADPIC »), prévoit :

« Lorsqu’ils subordonnent l’approbation de la commercialisation de produits pharmaceutiques ou de produits chimiques pour l’agriculture qui comportent des entités chimiques nouvelles à la communication de données non divulguées résultant d’essais ou d’autres données non divulguées, dont l’établissement demande un effort considérable, les membres protégeront ces données contre l’exploitation déloyale dans le commerce. En outre, les membres protégeront ces données contre la divulgation, sauf si cela est nécessaire pour protéger le public, ou à moins que des mesures ne soient prises pour s’assurer que les données sont protégées contre l’exploitation déloyale dans le commerce. »

Le droit de l’Union

3 L’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) nº 141/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1999, concernant les médicaments orphelins (JO 2000, L 18, p. 1), prévoit :

« Lorsqu’une autorisation de mise sur le marché est accordée pour un médicament orphelin en application du règlement (CEE) nº 2309/93 ou lorsque tous les États membres ont accordé une autorisation de mise sur le marché pour ce médicament, conformément aux procédures de reconnaissance mutuelle prévues aux articles 7 et 7 bis de la directive 65/65/CEE ou à l’article 9, paragraphe 4, de la directive 75/319/CEE du Conseil du 20 mai 1975 concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux médicaments, et sans préjudice des dispositions du droit de la propriété intellectuelle ou de toute autre disposition de droit [de l’Union], [l’Union européenne] et les États membres s’abstiennent, pendant dix ans, eu égard à la même indication thérapeutique, d’accepter une autre demande d’autorisation de mise sur le marché, d’accorder une autorisation de mise sur le marché ou de faire droit à une demande d’extension d’une autorisation de mise sur le marché existante pour un médicament similaire. »

4 Aux termes de l’article 1er, sous a), du règlement nº 1049/2001 :

« Le présent règlement vise à :

a) définir les principes, les conditions et les limites, fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé, du droit d’accès aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (ci-après dénommés “institutions”) prévu à l’article 255 [CE] de manière à garantir un accès aussi large que possible aux documents ».

5 L’article 4 de ce règlement, intitulé « Exceptions », dispose, à son paragraphe 2 et à son paragraphe 3, premier alinéa :

« 2. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection :

– des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle,

[...]

3. L’accès à un document établi par une institution pour son usage interne ou reçu par une institution et qui a trait à une question sur laquelle celle-ci n’a pas encore pris de décision est refusé dans le cas où sa divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé. »

6 L’article 14, paragraphe 11, du règlement (CE) nº 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments (JO 2004, L 136, p. 1), est libellé comme suit :

« Les médicaments à usage humain autorisés conformément aux dispositions du présent règlement bénéficient, sans préjudice du droit concernant la protection de la propriété industrielle et commerciale, d’une période de protection des données d’une durée de huit ans et d’une période de protection de la mise sur le marché d’une durée de dix ans portée à onze ans au maximum si le titulaire de l’autorisation de mise sur le marché obtient pendant les huit premières années de ladite période de dix ans une autorisation pour une ou plusieurs indications thérapeutiques nouvelles qui sont jugées, lors de l’évaluation scientifique conduite en vue de leur autorisation, apporter un bénéfice clinique important par rapport aux thérapies existantes. »

Les antécédents du litige

7 Les antécédents du litige et le contenu de la décision litigieuse sont exposés aux points 1 à 13 de l’arrêt attaqué. Pour les besoins de la présente procédure, ils peuvent être résumés de la manière suivante.

8 La requérante a conçu le médicament Translarna utilisé dans le traitement de la dystrophie musculaire de Duchenne.

9 Au mois d’octobre 2012, la requérante a présenté à l’EMA une demande d’autorisation de mise sur le marché (ci-après l’« AMM ») pour le Translarna. Après avoir, dans un premier temps, rejeté cette demande, l’EMA a décidé, le 31 juillet 2014, d’octroyer une AMM conditionnelle à la requérante.

10 Le 13 octobre 2015, l’EMA a informé la requérante qu’une société pharmaceutique souhaitait avoir accès à un rapport d’essai clinique figurant dans le dossier de demande d’AMM du Translarna (ci-après le « rapport litigieux »).

11 La requérante a demandé à l’EMA de considérer le rapport litigieux comme étant intégralement confidentiel. Cette demande a été rejetée par la décision litigieuse.

12 Par cette décision, l’EMA a accordé l’accès à l’intégralité du rapport, sous réserve de quelques occultations. Elle a estimé que la totalité du contenu de ce rapport ne pouvait pas bénéficier des exceptions au droit d’accès prévues à l’article 4 du règlement nº 1049/2001, la requérante n’ayant pas démontré que chacun des éléments de ce rapport constituait une information commerciale confidentielle.

13 L’EMA a considéré que la divulgation du rapport litigieux était conforme au règlement nº 1049/2001, à sa politique de transparence et à l’accord ADPIC.

14 Elle a indiqué que la décision d’octroyer une AMM conditionnelle avait déjà été adoptée, de sorte que l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001 ne trouvait pas à s’appliquer.

15 Elle a signalé avoir, de sa propre initiative, occulté les références aux discussions sur l’élaboration de protocoles avec la US Food and Drug Administration (administration des denrées alimentaires et des médicaments, États-Unis d’Amérique), les numéros de lots, les matériels et équipements, les analyses exploratoires, la description quantitative et qualitative de la méthode...

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