Criminal proceedings against Magatte Gueye (C-483/09) and Valentín Salmerón Sánchez (C-1/10).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:583
Docket NumberC-1/10,C-483/09
Celex Number62009CJ0483
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date15 September 2011

Affaires jointes C-483/09 et C-1/10

Procédures pénales

contre

Magatte Gueye
et
Valentín Salmerón Sánchez

(demandes de décision préjudicielle, introduites par

l'Audiencia provincial de Tarragona)

«Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Décision-cadre 2001/220/JAI — Statut des victimes dans le cadre de procédures pénales — Délits commis dans le cadre familial — Obligation de prononcer une peine accessoire d’éloignement interdisant au condamné de s’approcher de sa victime — Choix des types de peines et du niveau de celles-ci — Compatibilité avec les articles 2, 3 et 8 de ladite décision-cadre — Disposition nationale excluant la médiation pénale — Compatibilité avec l’article 10 de la même décision-cadre»

Sommaire de l'arrêt

1. Union européenne — Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Statut des victimes dans le cadre des procédures pénales — Décision-cadre 2001/220 — Rôle de la victime dans la procédure

(Décision-cadre du Conseil 2001/220, art. 2, 3 et 8)

2. Union européenne — Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Statut des victimes dans le cadre des procédures pénales — Décision-cadre 2001/220 — Obligation de promouvoir la médiation — Portée

(Décision-cadre du Conseil 2001/220, art. 10, § 1)

1. Les articles 2, 3 et 8 de la décision-cadre 2001/220, relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce qu’une sanction d’éloignement obligatoire d’une durée minimale, prévue par le droit pénal d’un État membre à titre de peine accessoire, soit prononcée à l’encontre des auteurs de violences commises dans le cadre familial, alors même que les victimes de celles-ci contestent l’application d’une telle sanction.

En effet, d'une part, en ce qui concerne les obligations énoncées à l’article 2, paragraphe 1, de ladite décision-cadre, celles-ci visent à garantir que la victime puisse effectivement prendre part au procès pénal de manière adéquate, ce qui n’implique pas qu’une mesure d’éloignement obligatoire ne puisse être prononcée contre l’avis de la victime. D'autre part, le droit procédural à être entendu au sens de l’article 3, premier alinéa, de la même décision-cadre ne confère aux victimes aucun droit quant au choix des types de peines ni quant au niveau de ces peines. La protection pénale contre les actes de violence domestique ne vise pas seulement à protéger les intérêts de la victime mais également d’autres intérêts plus généraux de la société. Enfin, la protection de l’article 8, qui vise notamment à protéger d’une manière appropriée la victime contre l’auteur de l’infraction durant la procédure pénale, ne saurait être comprise en ce sens que les États membres sont également tenus de protéger les victimes contre les effets indirects que produiraient, à un stade ultérieur, les peines infligées par le juge national.

Par ailleurs, l’obligation de prononcer une mesure d’éloignement conformément au droit matériel en cause ne relève pas du champ d’application de la décision-cadre.

(cf. points 56, 60-61, 66-67, 69-70, disp. 1)

2. L’article 10, paragraphe 1, de la décision-cadre 2001/220, relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales, doit être interprété en ce sens qu’il permet aux États membres, eu égard à la catégorie particulière des infractions commises dans le cadre familial, d’exclure le recours à la médiation dans toutes les procédures pénales relatives à de telles infractions.

À cet égard, outre la circonstance que l’article 34, paragraphe 2, UE laisse aux autorités nationales la compétence quant à la forme et aux moyens nécessaires afin d’atteindre le résultat voulu par les décisions-cadres, l’article 10, paragraphe 1, de la décision-cadre se borne à imposer aux États membres de veiller à promouvoir la médiation pour les infractions qu’ils jugent appropriées, de sorte que le choix des infractions pour lesquelles la médiation est ouverte relève de l’appréciation des États membres.

(cf. points 72, 76, disp. 2)







ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

15 septembre 2011 (*)

«Coopération policière et judiciaire en matière pénale – Décision-cadre 2001/220/JAI – Statut des victimes dans le cadre de procédures pénales – Délits commis dans le cadre familial – Obligation de prononcer une peine accessoire d’éloignement interdisant au condamné de s’approcher de sa victime – Choix des types de peines et du niveau de celles-ci – Compatibilité avec les articles 2, 3 et 8 de ladite décision-cadre – Disposition nationale excluant la médiation pénale – Compatibilité avec l’article 10 de la même décision-cadre»

Dans les affaires jointes C‑483/09 et C‑1/10,

ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 35 UE, introduites par l’Audiencia Provincial de Tarragona (Espagne), par décisions, l’une du 15 septembre 2009, modifiée par décision du 8 octobre suivant, et l’autre du 18 décembre 2009, parvenues à la Cour respectivement les 30 novembre 2009 et 4 janvier 2010, dans les procédures pénales contre

Magatte Gueye (C-483/09),

en présence de:

X,

et

Valentín Salmerón Sánchez (C-1/10),

en présence de:

Y,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot, président de chambre, MM. K. Schiemann, L. Bay Larsen (rapporteur), Mme A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 3 mars 2011,

considérant les observations présentées:

– pour le gouvernement espagnol, par Mme N. Díaz Abad, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze et J. Möller ainsi que par Mme S. Unzeitig, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de MM. P. Gentili et L. Ventrella, avvocati dello Stato,

– pour le gouvernement néerlandais, par Mmes C. Wissels et M. de Ree, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement autrichien, par M. E. Riedl, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement polonais, par M. M. Szpunar, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement suédois, par Mmes C. Meyer-Seitz et S. Johannesson, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mmes H. Walker et J. Stratford, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par M. R. Troosters et Mme S. Pardo Quintillán, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 12 mai 2011,

rend le présent

Arrêt

1 Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation des articles 2, 8 et 10 de la décision-cadre 2001/220/JAI du Conseil, du 15 mars 2001, relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales (JO L 82, p. 1, ci-après la «décision-cadre»).

2 Ces demandes ont été présentées dans le cadre de procédures pénales engagées à l’encontre respectivement de MM. Gueye et Salmerón Sánchez poursuivis pour infraction à l’interdiction, prononcée à titre de peine accessoire, de s’approcher de leur victime féminine ayant subi, dans le cadre familial, des mauvais traitements pour lesquels des sanctions principales leur ont par ailleurs été infligées.

Le cadre juridique

La réglementation de l’Union

3 La décision-cadre a été adoptée sur le fondement, notamment, de l’article 31, paragraphe 1, UE, lequel prévoit, sous c), que l’action en commun dans le domaine de la coopération judiciaire en matière pénale vise, entre autres, à assurer, dans la mesure nécessaire à l’amélioration de cette coopération, la compatibilité des règles applicables dans les États membres.

4 Il ressort du troisième considérant de la décision-cadre que le Conseil européen de Tampere (Finlande), au cours de sa réunion des 15 et 16 octobre 1999, a prévu d’établir des normes minimales pour la protection des victimes de la criminalité, notamment en ce qui concerne l’accès à la justice de ces victimes et leur droit à réparation.

5 Les quatrième, huitième et neuvième considérants de la décision-cadre sont libellés comme suit:

«(4) Il convient que les États membres rapprochent leurs dispositions législatives et réglementaires dans la mesure nécessaire à la réalisation de l’objectif consistant à offrir aux victimes de crimes un niveau élevé de protection, indépendamment de l’État membre dans lequel elles se trouvent.

[…]

(8) Il est nécessaire de rapprocher les règles et pratiques concernant le statut et les principaux droits des victimes, en veillant en particulier au respect de la dignité des victimes, à leur droit à informer et à être informées, à comprendre et à être comprises, à être protégées aux diverses étapes de la procédure […]

(9) Les dispositions de la présente décision-cadre n’imposent, toutefois, pas aux États membres de garantir aux victimes un traitement équivalent à celui des parties aux procès.»

6 Aux termes de l’article 1er de la décision-cadre, aux fins de celle-ci, on entend par:

«a) ‘victime’: la personne physique qui a subi un préjudice […] directement causé par des actes ou des omissions qui enfreignent la législation pénale d’un État membre;

[…]

c) ‘procédure pénale’: la procédure pénale conformément à la loi nationale applicable;

[…]

e) ‘médiation dans les affaires pénales’: la recherche, avant ou pendant la procédure pénale, d’une solution négociée entre la victime et l’auteur de l’infraction, par la médiation d’une personne compétente.»

7 L’article 2 de la décision-cadre, intitulé «Respect et reconnaissance», dispose à son paragraphe 1:

«Chaque État membre assure aux victimes un rôle réel et approprié dans son système judiciaire pénal. Il continue à œuvrer pour garantir aux victimes un traitement dûment respectueux de leur dignité personnelle pendant la procédure et reconnaît les droits et intérêts légitimes des victimes, notamment dans le cadre de la procédure pénale.»

8 L’article 3 de la décision-cadre, intitulé «Audition et...

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