Alessandra Venturini v ASL Varese and Others (C-159/12), Maria Rosa Gramegna v ASL Lodi and Others (C-160/12) and Anna Muzzio v ASL Pavia and Others (C-161/12).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2013:791
Date05 December 2013
Celex Number62012CJ0159
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-159/12,C-161/12
62012CJ0159

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

5 décembre 2013 ( *1 )

«Liberté d’établissement — Article 49 TFUE — Santé publique — Législation nationale interdisant aux parapharmacies la vente de médicaments soumis à prescription médicale à la charge du patient»

Dans les affaires jointes C‑159/12 à C‑161/12,

ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduites par le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (Italie), par décisions du 29 février 2012 et du 15 mars 2012, parvenues à la Cour le 2 avril 2012, dans les procédures

Alessandra Venturini

contre

ASL Varese,

Ministero della Salute,

Regione Lombardia,

Comune di Saronno,

Agenzia Italiana del Farmaco (AIFA) (C‑159/12),

et

Maria Rosa Gramegna

contre

ASL Lodi,

Ministero della Salute,

Regione Lombardia,

Comune di Sant’Angelo Lodigiano,

Agenzia Italiana del Farmaco (AIFA) (C‑160/12),

et

Anna Muzzio

contre

ASL Pavia,

Ministero della Salute,

Regione Lombardia,

Comune di Bereguardo,

Agenzia Italiana del Farmaco (AIFA) (C‑161/12),

en présence de:

Federfarma – Federazione Nazionale Unitaria dei Titolari di Farmacia Italiani (C‑159/12 à C‑161/12),

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, président de chambre, M. K. Lenaerts, vice-président de la Cour, faisant fonction de juge de la quatrième chambre, MM. M. Safjan, J. Malenovský (rapporteur) et Mme A. Prechal, juges,

avocat général: M. N. Wahl,

greffier: Mme A. Impellizzeri, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 mai 2013,

considérant les observations présentées:

pour Mmes Venturini, Gramegna et Muzzio, par Mes R. Cafari Panico, T. Ugoccioni et J. F. Brigandí, avvocati,

pour Federfarma – Federazione Nazionale Unitaria dei Titolari di Farmacia Italiani, par Mes M. Luciani, F. Rigano, G. M. Roberti et I. Perego, avvocati,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. F. Urbani Neri, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement espagnol, par Mmes M. J. García-Valdecasas Dorrego et S. Centeno Huerta, en qualité d’agents,

pour le gouvernement portugais, par MM. L. Inez Fernandes et A. P. Antunes, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme E. Montaguti et M. I. V. Rogalski, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 5 septembre 2013,

rend le présent

Arrêt

1

Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation de l’article 49 TFUE.

2

Ces demandes ont été présentées dans le cadre de litiges opposant Mmes Venturini (affaire C‑159/12), Gramegna (affaire C‑160/12) et Muzzio (affaire C‑161/12), trois pharmaciennes habilitées, membres de l’ordre professionnel des pharmaciens de Milan et propriétaires d’établissements commerciaux (ci-après les «parapharmacies»), à des Aziende Sanitarie Locali (ASL) (établissements publics de santé locaux), à savoir à l’ASL Varese (affaire C‑159/12), à l’ASL Lodi (affaire C‑160/12) et à l’ASL Pavia (affaire C‑161/12), au Ministero della Salute, à la Regione Lombardia, aux Comune di Saronno (affaire C‑159/12), Comune di Sant’Angelo Lodigiano (affaire C‑160/12) et Comune di Bereguardo (affaire C‑161/12), ainsi qu’à l’Agenzia Italiana del Farmaco (AIFA), au sujet d’une interdiction faite aux parapharmacies de vendre des médicaments soumis à prescription médicale qui ne sont pas à la charge du Servizio sanitario nazionale (SSN) (service de santé national) et sont entièrement payés par l’acheteur.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Le considérant 26 de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 septembre 2005, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles (JO L 255, p. 22), énonce:

«La présente directive n’assure pas la coordination de toutes les conditions d’accès aux activités du domaine de la pharmacie et de leur exercice. La répartition géographique des officines, notamment, et le monopole de dispense de médicaments devraient continuer de relever de la compétence des États membres. La présente directive n’affecte pas les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres qui interdisent aux sociétés l’exercice de certaines activités de pharmacien ou soumettent cet exercice à certaines conditions.»

Le droit italien

4

La loi no 468, du 22 mai 1913, a fait de la fourniture de services pharmaceutiques une «activité de base de l’État», qui ne pouvait être exercée que par des pharmacies municipales ou par des pharmacies privées pourvues d’une concession délivrée par le gouvernement.

5

Afin de garantir la bonne répartition des officines de pharmacies sur tout le territoire national, en évitant le risque qu’elles se concentrent uniquement dans les zones les plus attractives commercialement, un instrument administratif de limitation de l’offre a été mis en place, la «pianta organica» (ci-après le «tableau»), qui prévoit que ces officines sont réparties, sur le territoire, dans les limites d’un nombre maximal, considéré comme étant propre à répondre à la demande des personnes concernées afin d’assurer à chacune d’elles une part de marché et de couvrir les besoins en médicaments sur l’ensemble du territoire national.

6

Les développements normatifs ultérieurs ont, en substance, perpétué ce modèle.

7

Ainsi, aux termes de l’article 1er, paragraphes 1, 2 et 7, de la loi no 475, portant les règles concernant le service pharmaceutique (legge n. 475 – Norme concernenti il servizio farmaceutico), du 2 avril 1968 (GURI no 107, du 27 avril 1968, p. 2638), telle que modifiée par la loi no 362, portant les règles de restructuration du secteur pharmaceutique (legge n. 362 – Norme di riordino del settore farmaceutico), du 8 novembre 1991 (GURI no 269, du 16 novembre 1991, p. 3):

«1. L’autorisation d’ouvrir et d’exploiter une officine de pharmacie est délivrée par l’autorité compétente pour le territoire concerné.

2. Le nombre des autorisations pouvant être délivrées pour chaque commune est déterminé de sorte qu’il y ait une pharmacie pour 5000 habitants dans les communes ayant jusqu’à 12500 habitants, et une pharmacie pour 4000 habitants dans les autres communes.

[...]

7. Toute nouvelle officine de pharmacie doit être située à une distance non inférieure à 200 mètres des autres, de manière à répondre en toute hypothèse aux besoins des habitants de la zone.»

8

Un décret royal no 1265, du 27 juillet 1934, avait réservé, en vertu de son article 122, la vente des médicaments aux seules pharmacies.

9

À un stade ultérieur, la loi no 537, du 24 décembre 1993, a établi une nouvelle classification des médicaments sur la base des catégories suivantes, à savoir la catégorie A, pour les médicaments essentiels et les médicaments pour les maladies chroniques, la catégorie B, pour les médicaments autres que ceux relevant de la catégorie A et présentant un intérêt thérapeutique particulier et la catégorie C, pour des médicaments autres que ceux relevant des catégories A ou B. Aux termes de l’article 8, paragraphe 14, de la loi no 537, du 24 décembre 1993, les médicaments relevant des catégories A ou B sont entièrement pris en charge par le service de santé national, tandis que le coût des médicaments de la catégorie C reste entièrement à la charge du client.

10

Par la suite, l’article 85, paragraphe 1, de la loi no 388, du 23 décembre 2000, a aboli la catégorie B, tandis que l’article 1er de la loi no 311, du 30 décembre 2004, créait une nouvelle catégorie de médicaments, la catégorie C‑bis, pour des médicaments non assujettis à prescription médicale et qui, à la différence des produits relevant d’autres catégories, peuvent faire l’objet de publicité destinée au public. À l’instar des médicaments de la catégorie C, le coût des médicaments de la catégorie C‑bis reste à la charge du client.

11

Le décret-loi no 223, du 4 juillet 2006, converti en loi par la loi no 248, du 4 août 2006, permettait l’ouverture de parapharmacies, par l’intermédiaire desquelles leurs propriétaires étaient autorisés à écouler des médicaments relevant de la catégorie C‑bis. Plus récemment, le décret-loi no 201, du 6 décembre 2011, converti en loi par la loi no 214, du 22 décembre 2011, a encore étendu le nombre de médicaments qui peuvent être vendus par des parapharmacies, lesquelles peuvent ainsi désormais proposer au public certains médicaments de la catégorie C pour lesquels aucune ordonnance n’est requise.

Les litiges au principal et la question préjudicielle

12

Les requérantes au principal ont chacune saisi l’ASL compétente ainsi que les municipalités concernées, le Ministero della Salute et l’Agenzia Italiana del Farmaco, d’une demande d’autorisation de distribuer au public des médicaments à usage humain soumis à prescription médicale mais dont le coût est totalement à la charge du client ainsi que des médicaments à usage vétérinaire assujettis également à prescription médicale et dont le coût est également entièrement supporté par le client.

13

Le 17 août 2011, les ASL compétentes ont rejeté les demandes des requérantes au principal au motif que, sur le fondement de la réglementation nationale en vigueur, la vente de tels médicaments ne pouvait être réalisée que dans des pharmacies. Des refus similaires ont été opposés par le Ministero della Salute les 16 et 18 août 2011.

14

Les requérantes au principal ont introduit, devant le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia, un recours contre ces décisions soutenant que...

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