Jyske Bank Gibraltar Ltd v Administración del Estado.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2013:270
Date25 April 2013
Celex Number62011CJ0212
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑212/11
62011CJ0212

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

25 avril 2013 ( *1 )

«Prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme — Directive 2005/60/CE — Article 22, paragraphe 2 — Décision 2000/642/JAI — Obligation de déclaration des transactions financières suspectes à la charge des établissements de crédit — Établissement opérant sous le régime de la libre prestation des services — Identification de la cellule nationale de renseignement financier responsable de la collecte des informations — Article 56 TFUE — Entrave à la libre prestation des services — Exigences impérieuses d’intérêt général — Proportionnalité»

Dans l’affaire C‑212/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Supremo (Espagne), par décision du 21 mars 2011, parvenue à la Cour le 9 mai 2011, dans la procédure

Jyske Bank Gibraltar Ltd

contre

Administración del Estado,

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, faisant fonction de président de la troisième chambre, MM. K. Lenaerts, E. Juhász, J. Malenovský et D. Šváby (rapporteur), juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: Mme A. Impellizzeri, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 septembre 2012,

considérant les observations présentées:

pour Jyske Bank Gibraltar Ltd, par Mes M. Rubio de Casas, J. M. Olivares Blanco et J. de la Calle y Peral, abogados, ainsi que par M. D. Bufalá Balmaseda, procurador,

pour le gouvernement espagnol, par M. A. Rubio González et Mme N. Díaz Abad, en qualité d’agents,

pour le gouvernement français, par Mme N. Rouam et M. G. de Bergues, en qualité d’agents,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. F. Urbani Neri, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement polonais, par Mme B. Czech et M. M. Szpunar, en qualité d’agents,

pour le gouvernement roumain, par M. R. H. Radu ainsi que par Mmes A. Wellman et R. Nitu, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. J. Baquero Cruz et E. Traversa ainsi que par Mmes S. La Pergola et C. Vrignon, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 4 octobre 2012,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 22, paragraphe 2, de la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 octobre 2005, relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme (JO L 309, p. 15).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Jyske Bank Gibraltar Ltd (ci-après «Jyske»), établissement de crédit situé à Gibraltar et opérant en Espagne sous le régime de la libre prestation des services, à l’Administración del Estado au sujet de la décision du Consejo de Ministros (Conseil des ministres) du 23 octobre 2009 ayant rejeté le recours gracieux dirigé contre la décision du même Consejo de Ministros du 17 avril 2009 ayant infligé à Jyske deux sanctions financières d’un montant total de 1700000 euros et deux blâmes publics à la suite d’un refus ou d’un manque de diligence à fournir des informations sollicitées par le Servicio Ejecutivo de la Comisión para la Prevención de Blanqueo de Capitales (Autorité exécutive pour la prévention du blanchiment de capitaux, ci-après le «Servicio Ejecutivo»).

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 6, paragraphes 1 et 2, de la directive 91/308/CEE du Conseil, du 10 juin 1991, relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux (JO L 166, p. 77), telle que modifiée par la directive 2001/97/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 décembre 2001 (JO L 344, p. 76, ci-après la «directive 91/308»), prévoyait:

«1. Les États membres veillent à ce que les établissements et les personnes relevant de la présente directive, ainsi que leurs dirigeants et employés, coopèrent pleinement avec les autorités responsables de la lutte contre le blanchiment de capitaux:

a)

en informant, de leur propre initiative, ces autorités de tout fait qui pourrait être l’indice d’un blanchiment de capitaux;

b)

en fournissant à ces autorités, à leur demande, toutes les informations nécessaires conformément aux procédures prévues par la législation applicable.»

2. Les informations visées au paragraphe 1 sont transmises aux autorités responsables de la lutte contre le blanchiment de capitaux de l’État membre sur le territoire duquel se trouve l’établissement ou la personne qui fournit ces informations. Cette transmission est effectuée normalement par la ou les personnes désignées par l’établissement ou la personne relevant de la présente directive conformément aux procédures prévues à l’article 11, paragraphe 1, point a).»

4

La directive 91/308 a été abrogée et remplacée par la directive 2005/60, dont le considérant 40 énonce ce qui suit:

«Compte tenu du caractère international du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, il convient d’encourager autant que possible la coordination et la coopération entre les [cellules de renseignement financier (ci-après les ‘CRF’)] telles que mentionnées dans la décision 2000/642/JAI du Conseil du 17 octobre 2000 relative aux modalités de coopération entre les cellules de renseignement financier des États membres en ce qui concerne l’échange d’informations [(JO L 271, p. 4)], y compris la mise en place d’un réseau européen de cellules de renseignement financier. À cette fin, la Commission devrait prêter toute l’assistance nécessaire pour faciliter cette coordination, notamment une assistance financière.»

5

En vertu de l’article 5 de cette directive, «[l]es États membres peuvent arrêter ou maintenir en vigueur, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes pour prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme».

6

L’article 7 de ladite directive prévoit:

«Les établissements et personnes soumis à la présente directive appliquent des mesures de vigilance à l’égard de leur clientèle dans les cas suivants:

a)

lorsqu’ils nouent une relation d’affaires;

b)

lorsqu’ils concluent, à titre occasionnel, une transaction d’un montant de 15000 EUR au moins, que la transaction soit effectuée en une seule ou plusieurs opérations entre lesquelles un lien semble exister;

c)

lorsqu’il y a suspicion de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme, indépendamment de tous seuils, exemptions ou dérogations applicables;

d)

lorsqu’il existe des doutes concernant la véracité ou la pertinence des données précédemment obtenues aux fins de l’identification d’un client.»

7

Aux termes de l’article 21 de cette même directive:

«1. Chaque État membre établit une CRF, afin de combattre efficacement le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

2. Celle-ci doit être créée sous la forme d’une cellule nationale centrale. Elle doit être chargée de recevoir (et, dans la mesure de ses pouvoirs, de demander), d’analyser et de communiquer aux autorités compétentes les informations divulguées concernant un éventuel blanchiment de capitaux, un éventuel financement du terrorisme ou toute information requise par les dispositions législatives ou réglementaires nationales. Elle est dotée des ressources adéquates pour lui permettre de remplir ses missions.

3. Les États membres veillent à ce que la CRF ait accès, directement ou indirectement, en temps opportun aux informations financières, administratives et judiciaires dont elle a besoin pour lui permettre de remplir correctement ses missions.»

8

L’article 22 de la directive 2005/60 dispose:

«1. Les États membres exigent des établissements et des personnes soumis à la présente directive et, le cas échéant, de leurs dirigeants et employés qu’ils coopèrent pleinement:

a)

en informant promptement la CRF, de leur propre initiative, lorsqu’ils savent, soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu’une opération ou une tentative de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme est en cours ou a eu lieu;

b)

en fournissant promptement à la CRF, à la demande de celle-ci, toutes les informations nécessaires, conformément aux procédures prévues par la législation applicable.

2. Les informations visées au paragraphe 1 sont transmises à la CRF de l’État membre sur le territoire duquel se trouve l’établissement ou la personne qui les transmet. La (les) personne(s) désignée(s) conformément aux procédures prévues à l’article 34 est (sont) normalement chargée(s) de la transmission de ces informations.»

9

Ainsi qu’il ressort de l’article 3, paragraphes 1 et 2, sous f), de la directive 2005/60, les établissements visés à l’article 22 de celle-ci comprennent également les succursales, au sens de l’article 1er, point 3, de la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 mars 2000, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et son exercice (JO L 126, p. 1). La succursale est définie dans cette dernière disposition comme étant un siège d’exploitation qui constitue une partie dépourvue de personnalité juridique d’un établissement de crédit et qui effectue directement, en tout ou en partie, les opérations inhérentes à l’activité d’établissement de crédit.

10

L’article 1er de la décision 2000/642 dispose:

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