Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti Srl v Giuseppe Calafiori.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2006:208
Docket NumberC-451/03
Celex Number62003CJ0451
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date30 March 2006

Affaire C-451/03

Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti Srl

contre

Giuseppe Calafiori

(demande de décision préjudicielle, introduite par la Corte d'appello di Milano)

«Liberté d'établissement — Libre prestation de services — Règles de concurrence applicables aux entreprises — Aides d'État — Centres d'assistance fiscale — Exercice de certaines activités de conseil et d'assistance fiscale — Droit exclusif — Rémunération de ces activités»

Conclusions de l'avocat général M. D. Ruiz-Jarabo Colomer, présentées le 28 juin 2005

Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 30 mars 2006

Sommaire de l'arrêt

1. Concurrence — Entreprises publiques et entreprises auxquelles les États membres accordent des droits spéciaux ou exclusifs — Création d'une position dominante

(Art. 82 CE et 86, § 1, CE)

2. Questions préjudicielles — Compétence de la Cour

3. Libre circulation des personnes — Liberté d'établissement — Libre prestation des services

(Art. 43 CE et 49 CE)

4. Aides accordées par les États — Notion

(Art. 87, § 1, CE)

1. Le simple fait de créer une position dominante par l'octroi de droits spéciaux ou exclusifs au sens de l'article 86, paragraphe 1, CE n'est pas, en tant que tel, incompatible avec l'article 82 CE. Un État membre n'enfreint les interdictions édictées par ces deux dispositions que lorsque l'entreprise en cause est amenée, par le simple exercice des droits spéciaux ou exclusifs qui lui ont été conférés, à exploiter sa position dominante de façon abusive ou lorsque ces droits sont susceptibles de créer une situation dans laquelle cette entreprise est amenée à commettre de tels abus.

(cf. point 23)

2. Lorsque, dans le cadre d'une question préjudicielle, l'ensemble des éléments de l'activité en cause au principal se cantonnent à l'intérieur d'un seul État membre, une réponse peut néanmoins être utile à la juridiction de renvoi, notamment dans l'hypothèse où son droit national imposerait de faire bénéficier un ressortissant dudit État membre des mêmes droits que ceux qu'un ressortissant d'un autre État membre tirerait du droit communautaire dans la même situation. Une telle question doit donc être jugée recevable puisqu'il y a ainsi lieu d'examiner si les dispositions du traité, dont l'interprétation est sollicitée, s'opposent à l'application de la réglementation nationale en cause au principal, dans la mesure où elle serait appliquée à des personnes résidant dans d'autres États membres.

(cf. points 28-30)

3. Les articles 43 CE et 49 CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui réserve de manière exclusive le droit d'exercer certaines activités de conseil et d'assistance en matière fiscale à des centres d'assistance fiscale (CAF) devant être constitués sous forme de sociétés anonymes, exercer leur activité sur autorisation du ministère des Finances et ne pouvant être constitués que par des sujets de droit énoncés par décret législatif. En effet, une telle réglementation, d'une part, empêche totalement l'accès au marché des services en cause aux opérateurs économiques établis dans d'autres États membres et, d'autre part, en limitant la possibilité de constituer des CAF à certains sujets de droit remplissant des conditions strictes, voire à certains de ces sujets ayant leur siège dans l'État membre concerné, est, en effet, susceptible de rendre plus difficile, voire d'empêcher totalement, l'exercice par les opérateurs économiques en provenance d'autres États membres de leur droit de s'établir dans l'État membre en cause dans le but de fournir les services en question.

(cf. points 7, 33-34, 50, disp. 1)

4. Une mesure par laquelle un État membre prévoit le versement d'une compensation à la charge du budget de l'État en faveur de certaines entreprises chargées d'assister les contribuables, en ce qui concerne l'élaboration et la transmission des déclarations fiscales à l'administration fiscale, doit être qualifiée d'aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE lorsque, d'une part, le niveau de la compensation dépasse ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l'exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d'un bénéfice raisonnable pour l'exécution de ces obligations, et, d'autre part, la compensation n'est pas déterminée sur la base d'une analyse des coûts qu'une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement dotée de moyens nécessaires afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d'un bénéfice raisonnable pour l'exécution de ces obligations.

(cf. point 72, disp. 2)




ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

30 mars 2006 (*)

«Liberté d’établissement – Libre prestation de services – Règles de concurrence applicables aux entreprises – Aides d’État – Centres d’assistance fiscale – Exercice de certaines activités de conseil et d’assistance fiscale – Droit exclusif – Rémunération de ces activités»

Dans l’affaire C-451/03,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par la Corte d’appello di Milano (Italie), par décision du 15 octobre 2003, parvenue à la Cour le 27 octobre 2003, dans la procédure

Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti Srl

contre

Giuseppe Calafiori,

en présence de:

Pubblico Ministero,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM. J. Malenovský, S. von Bahr (rapporteur), A. Borg Barthet et U. Lõhmus, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 mai 2005,

considérant les observations présentées:

– pour Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti Srl, par Mes F. Capelli et M. Valcada, avvocati,

– pour le gouvernement italien, par M. I. M. Braguglia, en qualité d’agent, assisté de M. D. Del Gaizo, avvocato dello Stato,

– pour la Commission des Communautés européennes, par MM. E. Traversa et V. Di Bucci, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 28 juin 2005,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 4 CE, 10 CE, 82 CE, 86 CE et 98 CE en matière de concurrence, des articles 43 CE, 48 CE et 49 CE en matière de droit d’établissement et de libre prestation des services, et de l’article 87 CE en matière d’aides d’État.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant la société Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti Srl (ci-après «ADC Servizi») à M. Calafiori, notaire, au sujet du refus de celui‑ci de procéder à l’inscription au registre des entreprises de Milan de la décision prise par l’assemblée générale de cette société de modifier les statuts de cette dernière.

Le cadre juridique national

3 Le cadre juridique national, tel qu’il résulte de la décision de renvoi, peut être résumé de la manière suivante.

4 Le décret législatif nº 241 du 9 juillet 1997, tel que complété par le décret législatif nº 490 du 28 décembre 1998 (ci-après le «décret législatif nº 241/97»), réserve aux seuls centres d’assistance fiscale (ci‑après les «CAF») le droit d’exercer certaines activités de conseil et d’assistance en matière fiscale, parmi lesquelles les activités relatives à la déclaration annuelle des revenus des travailleurs salariés et assimilés.

5 L’article 34, paragraphe 4, du décret législatif nº 241/97 attribue une compétence exclusive aux CAF en vue de la liquidation de la déclaration fiscale des revenus effectuée selon le modèle simplifié (modèle 730), y compris la remise au contribuable d’une copie de la déclaration remplie et de la fiche d’apurement de l’impôt, ainsi que la communication aux employeurs chargés du recouvrement du résultat de la déclaration en vue de procéder à une compensation à la source et l’envoi des déclarations à l’administration fiscale.

6 L’article 35, paragraphe 2, sous b), du décret législatif nº 241/97 réserve en outre aux CAF la compétence de contrôler que les données figurant dans la déclaration sont conformes à ses annexes.

7 Les CAF doivent être constitués sous forme de sociétés anonymes qui exercent leur activité sur autorisation du ministère des Finances. Ils ne peuvent être constitués que par les sujets de droit énoncés aux articles 32 et 33 du décret législatif nº 241/97. Il s’agit, notamment, soit des associations patronales, soit des organisations syndicales ou des organisations territoriales déléguées par celles‑ci et comptant au minimum 50 000 adhérents, soit de certains employeurs chargés du recouvrement de l’impôt employant au minimum 50 000 salariés, ou encore des associations de travailleurs ayant fondé des institutions de patronage («istituti di patronato») et comptant un minimum de 50 000 adhérents. En ce qui concerne certains des sujets de droit, mentionnés dans le décret législatif nº 241/97, il apparaît que la possibilité de créer des CAF est limitée à ceux qui sont établis en Italie.

8 En outre, il est prévu à l’article 33, paragraphe 2, du décret législatif nº 241/97 que les CAF désignent une ou plusieurs personnes responsables de l’assistance fiscale parmi les personnes inscrites à l’ordre des experts-comptables ou à l’ordre des comptables.

9 La législation en cause prévoit, pour les activités réservées aux CAF, le versement à ces derniers d’une indemnité, à la charge du budget de l’État, fixée initialement à 25 000 LIT pour chaque déclaration remplie et transmise, et qui s’est élevée ultérieurement à environ 14 euros.

Le litige au principal

10 ADC Servizi, établie à Milan, avait pour objet l’assistance et la prestation de conseils en matière comptable et administrative.

11 Le 25 février 2003, l’assemblée générale extraordinaire de cette société a décidé d’approuver l’adoption de nouveaux statuts afin...

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