European Commission v Kingdom of Spain.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:781
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC‑610/10
Date11 December 2012
Procedure TypeRecurso por incumplimiento
Celex Number62010CJ0610
62010CJ0610

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

11 décembre 2012 ( *1 )

«Manquement d’État — Aides d’État — Arrêt de la Cour constatant un manquement — Exception d’irrecevabilité — Articles 228, paragraphe 2, CE et 260, paragraphe 2, TFUE — Inexécution — Sanctions pécuniaires»

Dans l’affaire C‑610/10,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, introduit le 22 décembre 2010,

Commission européenne, représentée par MM. B. Stromsky et C. Urraca Caviedes, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Royaume d’Espagne, représenté par Mme N. Díaz Abad, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

soutenu par:

République tchèque, représentée par MM. M. Smolek, D. Hadroušek et Mme J. Očková, en qualité d’agents,

partie intervenante,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, M. K. Lenaerts, vice-président, MM. A. Tizzano, M. Ilešič, T. von Danwitz et J. Malenovský, présidents de chambre, MM. U. Lõhmus, E. Levits, A. Ó Caoimh, J.‑C. Bonichot, A. Arabadjiev (rapporteur), Mme C. Toader et M. J.-J. Kasel, juges,

avocat général: M. J. Mazák,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 12 juin 2012,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 septembre 2012,

rend le présent

Arrêt

1

Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour:

de constater que, en n’ayant pas adopté toutes les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du 2 juillet 2002, Commission/Espagne (C-499/99, Rec. p. I-6031), relatif à la récupération des aides qui, aux termes de la décision 91/1/CEE de la Commission, du 20 décembre 1989, concernant les aides accordées en Espagne par le gouvernement central et plusieurs gouvernements autonomes à MAGEFESA, producteur d’ustensiles de cuisine en acier inoxydable et de petits appareils électriques (JO 1991, L 5, p. 18), ont été jugées illégales et incompatibles avec le marché commun, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette décision et de l’article 260, paragraphe 1, TFUE;

d’ordonner au Royaume d’Espagne de verser à la Commission une astreinte journalière d’un montant de 131136 euros, pour le retard dans l’exécution de l’arrêt Commission/Espagne, précité, à compter du prononcé de l’arrêt dans la présente affaire jusqu’à l’exécution dudit arrêt Commission/Espagne;

d’ordonner au Royaume d’Espagne de verser à la Commission une somme forfaitaire dont le montant résulte de la multiplication d’un montant journalier de 14343 euros par le nombre de jours durant lesquels l’infraction a persisté, compris entre le prononcé de l’arrêt Commission/Espagne, précité, et celui de l’arrêt rendu dans la présente affaire ou la date à laquelle cet État membre a mis fin à l’infraction, et

de condamner le Royaume d’Espagne aux dépens.

I – Les antécédents du litige

2

Le 20 décembre 1989, la Commission a adopté la décision 91/1, par laquelle elle a déclaré illégales et incompatibles avec le marché commun les aides accordées par le gouvernement central espagnol et plusieurs gouvernements régionaux autonomes aux entreprises du groupe Magefesa, sous la forme de garanties de prêts, d’un prêt à des conditions autres que celles du marché, d’aides non remboursables ainsi que d’une bonification d’intérêts.

3

Le groupe Magefesa est, pour ce qui concerne la présente affaire, constitué de quatre entreprises industrielles fabriquant des articles ménagers, à savoir Industrias Domésticas SA (ci-après «Indosa»), Cubertera del Norte SA (ci-après «Cunosa»), Manufacturas Gur SA (ci-après «GURSA») et Manufacturas Inoxidables Gibraltar SA (ci-après «MIGSA»).

4

Les aides qui, au titre de la décision 91/1, ont été considérées comme illégales et incompatibles avec le marché commun se répartissent, en ce qui concerne les aides octroyées par la Communauté autonome du Pays basque, comme suit:

une garantie de prêt de 300 millions de ESP, accordée directement à Indosa;

une garantie de prêt de 672 millions de ESP accordée à Fiducias de la cocina y derivados SA, société de gestion créée au Pays basque dans le but d’attribuer aux entreprises du groupe Magefesa lesdites aides, et

une bonification d’intérêts de 9 millions de ESP.

5

Par la même décision, les autorités espagnoles ont été invitées, notamment, à retirer les garanties de prêts, à transformer le prêt à taux réduit en crédit normal et à récupérer les aides non remboursables.

II – L’arrêt Commission/Espagne

6

Le 22 décembre 1999, la Commission a introduit, en application de l’article 88, paragraphe 2, deuxième alinéa, CE, un recours en manquement contre le Royaume d’Espagne ayant pour objet de faire constater que ce dernier n’avait pas pris, dans les délais prescrits, les mesures nécessaires pour se conformer, notamment, à la décision 91/1.

7

Dans son arrêt Commission/Espagne, précité, la Cour a jugé, notamment, que le Royaume d’Espagne avait manqué à son obligation d’adopter les mesures nécessaires pour se conformer à ladite décision, en tant que celle-ci avait déclaré illégales et incompatibles avec le marché commun des aides accordées aux entreprises Indosa, GURSA, MIGSA et Cunosa.

III – La procédure précontentieuse

8

À la suite de l’arrêt Commission/Espagne, précité, la Commission et le Royaume d’Espagne ont échangé une correspondance volumineuse au sujet de l’exécution de cet arrêt.

9

Il ressort du dossier soumis à la Cour que, bien qu’Indosa ait été déclarée en faillite le 19 avril 1994, cette dernière a poursuivi ses activités.

10

En réponse aux demandes d’information de la Commission des 25 mars et 27 juillet 2004 ainsi que du 31 janvier 2005, les autorités espagnoles ont notamment indiqué, par lettre du 31 mars 2005, que l’accord de liquidation d’Indosa avait été approuvé le 29 septembre 2004, que cette approbation avait été contestée sans que cela entraîne d’effet suspensif et que, dès lors, la procédure de liquidation des actifs d’Indosa pouvait débuter.

11

Par lettres des 5 juillet et 16 décembre 2005, la Commission a relevé que, près de trois ans après le prononcé de l’arrêt Commission/Espagne, précité, Indosa poursuivait ses activités, la procédure de liquidation de ses actifs n’avait pas encore été entamée et l’aide illégale n’avait pas été récupérée. En outre, cette institution a demandé qu’il soit mis fin aux activités d’Indosa et que la liquidation de ses actifs soit menée à bien au plus tard le 25 janvier 2006.

12

Au cours de cette même année 2006, la Commission a considéré que la décision 91/1 avait été exécutée en ce qui concerne GURSA, MIGSA et Cunosa, celles-ci ayant cessé leurs activités et leurs actifs ayant été vendus au prix du marché.

13

Par lettre du 30 mai 2006, le Royaume d’Espagne a fait savoir que l’accord de liquidation d’Indosa avait acquis un caractère définitif le 2 mai 2006.

14

La Commission a cependant fait valoir, dans une série de lettres datant, notamment, des 18 octobre 2006, 27 janvier 2007 et 26 septembre 2008, que les activités d’Indosa n’avaient pas réellement cessé et que ses actifs n’avaient pas été liquidés. En effet, les informations fournies par le Royaume d’Espagne auraient montré que les activités d’Indosa se poursuivaient par l’intermédiaire de sa filiale à 100 %, à savoir la Compañía de Menaje Doméstico SL (ci-après «CMD»), qui avait été créée par l’administrateur de la faillite d’Indosa afin de commercialiser la production de l’entreprise et à laquelle ont été transférés tous les actifs de cette dernière ainsi que son personnel. Estimant que les actifs d’Indosa n’avaient pas été transférés selon une procédure ouverte et transparente, la Commission a conclu que CMD poursuivait l’activité subventionnée et que, par conséquent, l’exécution effective de la décision 91/1 nécessitait la récupération des aides incompatibles auprès de CMD.

15

Le Royaume d’Espagne a répondu par une série de lettres, parmi lesquelles celles des 8 octobre et 13 novembre 2008 ainsi que des 24 juillet et 25 août 2009, dont il ressort que CMD s’était déclarée en faillite le 30 juin 2008 et que ses administrateurs judiciaires avaient présenté une demande de résiliation collective des contrats de travail de l’ensemble du personnel, laquelle avait été acceptée par la juridiction nationale compétente.

16

Par lettres des 18 août, 7 et 21 septembre 2009, la Commission a demandé qu’il lui soit communiqué un calendrier détaillé indiquant la date exacte de la cessation des activités de CMD, ainsi que de plus amples informations sur la procédure de cession des actifs de celle-ci, y compris la preuve que cette cession avait été effectuée aux conditions du marché. Cette institution a également demandé au Royaume d’Espagne de fournir des preuves de nature à établir que les aides déclarées incompatibles étaient inscrites au passif de CMD en tant que dettes dans la masse.

17

Par lettres des 21 septembre, 13 et 21 octobre 2009, le Royaume d’Espagne a répondu, en substance, que CMD avait cessé ses activités le 30 juillet 2009, sans pour autant fournir à la Commission le calendrier détaillé qu’elle avait demandé.

18

Le 3 septembre 2009, des anciens salariés de CMD ont créé une société à responsabilité limitée à participation ouvrière, dénommée Euskomenaje 1870 SLL (ci-après «Euskomenaje»), dont l’activité consiste en la fabrication et la commercialisation d’ustensiles de cuisine et de...

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