Asociación Profesional de Empresas Navieras de Líneas Regulares (Analir) and Others v Administración General del Estado.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2000:658
Docket NumberC-205/99
Celex Number61999CC0205
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date30 November 2000
EUR-Lex - 61999C0205 - FR 61999C0205

Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 30 novembre 2000. - Asociación Profesional de Empresas Navieras de Líneas Regulares (Analir) et autres contre Administración General del Estado. - Demande de décision préjudicielle: Tribunal Supremo - Espagne. - Libre circulation des services - Cabotage maritime - Conditions d'octroi et de maintien d'une autorisation administrative préalable - Application concomitante des modalités d'imposition d'obligations de service public et de contrat de service public. - Affaire C-205/99.

Recueil de jurisprudence 2001 page I-01271


Conclusions de l'avocat général

1. Dans cette affaire préjudicielle, le Tribunal Supremo (Espagne) nous demande d'interpréter le règlement (CEE) n° 3577/92 du Conseil, du 7 décembre 1992, concernant l'application du principe de la libre circulation des services aux transports maritimes à l'intérieur des États membres (cabotage maritime) (ci-après le «règlement»), afin de lui permettre de porter un jugement au sujet de la compatibilité avec celui-ci du décret espagnol n° 1466/1997, du 19 septembre 1997, relatif au régime juridique des lignes régulières de cabotage maritime et des transports maritimes d'intérêt public (BOE n° 226, du 20 septembre 1997, p. 27712, ci-après le «décret royal n° 1466»).

Le cadre juridique

A - Droit communautaire

2. Le règlement dispose dans son article 1er, paragraphe 1, que,

«À partir du 1er janvier 1993, la libre prestation des services de transport maritime à l'intérieur d'un État membre (cabotage maritime) s'applique aux armateurs communautaires exploitant des navires immatriculés dans un État membre...»

3. Son article 2, point 3, précise que l'on entend par

«contrat de service public: un contrat conclu entre les autorités compétentes d'un État membre et un armateur communautaire dans le but de fournir au public des services de transport suffisants.

Un contrat de service public peut en particulier porter sur:

- des services de transport répondant à des normes fixées de continuité, de régularité, de capacité et de qualité,

- des services de transport complémentaires,

- des services de transport à des prix et des conditions déterminés, notamment pour certaines catégories de voyageurs ou pour certaines liaisons,

- des adaptations des services aux besoins effectifs».

4. Le point 4 de ce même article mentionne que l'on entend par «obligations de service public» les obligations que, s'il considérait son propre intérêt commercial, l'armateur communautaire en question n'assumerait pas ou n'assumerait pas dans la même mesure ni dans les mêmes conditions.

5. L'article 4 du règlement dispose que:

«1. Un État membre peut conclure des contrats de service public avec des compagnies de navigation qui participent à des services réguliers à destination et en provenance d'îles ainsi qu'entre des îles ou leur imposer des obligations de service public en tant que condition à la prestation de services de cabotage.

...

2. S'ils imposent des obligations de service public, les États membres s'en tiennent à des exigences concernant les ports à desservir, la régularité, la continuité, la fréquence, la capacité à prester le service, les tarifs pratiqués et l'équipage du navire.

Toute compensation due, le cas échéant, en contrepartie d'obligations de service public doit être versée à tous les armateurs communautaires».

B - Droit national

6. Le décret royal n° 1466 indique que les navigations d'intérêt public sont toutes les lignes régulières entre la péninsule et les îles, lignes qui relient la péninsule à Ceuta ou Melilla ainsi que les lignes qui relient les territoires non péninsulaires entre eux.

7. Le décret royal n° 1466 prévoit trois régimes différents:

- un régime de communication pour le cabotage péninsulaire (article 3),

- un régime de contrat d'intérêt public (article 4),

- un régime d'octroi préalable d'une autorisation administrative (articles 6 et 8).

8. L'autorisation administrative prévue dans le décret royal n° 1466 est subordonnée à deux types de conditions:

- l'exigence d'être à jour dans le paiement de ses obligations d'impôt et de sécurité sociale (article 6),

- des exigences portant sur la régularité, la continuité, la capacité à fournir le service, l'équipage et, éventuellement, sur les ports à desservir, la fréquence et, le cas échéant, les tarifs (article 8).

Les questions préjudicielles

9. L'Asociación Profesional de Empresas Navieras de Líneas Regulares (Analir) e.a. (ci-après «Analir e.a.») ayant introduit un recours en annulation du décret royal n° 1466 fondé sur l'incompatibilité de celui-ci avec le droit communautaire, la juridiction de renvoi a posé les questions préjudicielles suivantes:

«1) Les dispositions combinées des articles 4 et 1er du règlement (CEE) n° 3577/92 du Conseil, du 7 décembre 1992, concernant l'application du principe de la libre circulation des services aux transports maritimes à l'intérieur des États membres (cabotage maritime), peuvent-elles être interprétées en ce sens qu'elles permettent de soumettre la prestation des services de cabotage avec les îles par les entreprises qui desservent des lignes maritimes régulières à l'obtention d'une autorisation administrative préalable?

2) En cas de réponse affirmative à la première question, l'octroi et le maintien de cette autorisation administrative peuvent-ils être subordonnés au respect de certaines conditions, comme celle d'être à jour dans le paiement de dettes d'impôt ou de sécurité sociale, distinctes de celles visées à l'article 4, paragraphe 2, du règlement précité?

3) L'article 4, paragraphe 1, du règlement n° 3577/92 peut-il être interprété en ce sens qu'il permet, sur une même ligne ou un même trajet maritime, d'imposer des obligations de service public à des entreprises de navigation et de conclure simultanément avec d'autres entreprises des contrats de service public au sens de l'article 1er, point 3, du règlement, pour la participation au même trafic régulier à destination et en provenance d'îles ainsi qu'entre des îles?»

10. La juridiction de renvoi signale que, au moment de l'adoption du décret royal n° 1466, dont l'annulation est poursuivie dans le cadre du litige au principal, le royaume d'Espagne disposait jusqu'au 1er janvier 1999 d'une exemption à l'obligation de libéralisation du cabotage maritime. Elle ajoute toutefois, selon moi à bon droit, que les questions posées ne sont pas dénuées de pertinence ratione temporis. En effet, elle constate, dans son ordonnance rendue le 12 mai 1999, donc après l'expiration de l'exemption, que les dispositions nationales dont elle a à apprécier la validité n'ont pas été modifiées à la fin de l'exemption et qu'elles ont une vocation de permanence.

Quant à la première question préjudicielle

11. Notons, à titre préliminaire, que la question posée vise la possibilité pour un État membre de recourir à un système d'autorisation préalable lié à l'imposition d'obligations de service public. N'est donc pas en cause, en l'espèce, la question des mesures qu'un État membre est susceptible de prendre au titre de la sauvegarde de la sécurité de la navigation ou encore des nécessités de l'exploitation des infrastructures portuaires (par exemple l'accès aux quais).

12. Il n'est pas contesté que le règlement vise à mettre en oeuvre le principe de la libre prestation de services dans le contexte du cabotage maritime.

13. Ceci ressort tant de son intitulé, précité, que de ses considérants, où l'on peut lire que «l'abolition des restrictions à la prestation des services de transport maritime à l'intérieur des États membres est nécessaire à la création du marché intérieur», qui comporte un espace dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée. Il s'ensuit que «la libre prestation des services devrait s'appliquer aux transports maritimes à l'intérieur des États membres» .

14. Ce principe trouve son expression dans l'article 1er, paragraphe 1, précité, du règlement.

15. Il n'est pas non plus contesté entre les parties que l'exigence d'une autorisation préalable, qui implique, par définition, que la prestation de services est interdite tant que l'autorisation n'est pas accordée, constitue une restriction à la libre prestation de services.

16. En effet, la divergence de vues entre les différents intervenants porte sur la question de savoir si, et, le cas échéant, dans quelle mesure, une telle restriction est susceptible d'être justifiée par les nécessités du service public auxquelles se réfère le règlement.

17. Les requérantes au principal admettent que les États membres peuvent juger nécessaire d'imposer aux opérateurs des obligations de service public, mais estiment que ceci ne les oblige pas à soumettre la prestation de services à une autorisation préalable. En effet, selon elles, le respect de telles obligations pourrait être garanti par un régime d'attribution de licences par catégories de lignes et selon des procédures de déclaration.

18. Le royaume d'Espagne et la République hellénique prennent une position diamétralement opposée et font valoir qu'un régime d'autorisation préalable serait, de façon évidente, nécessaire pour garantir l'exécution des obligations de service public.

19. Le gouvernement espagnol met l'accent sur les arguments suivants au soutien de sa thèse selon laquelle l'exigence d'une autorisation administrative ne fait pas obstacle à la libéralisation du cabotage avec les îles.

20. Il insiste, tout d'abord, sur l'importance que revêt, tant au regard de la Constitution espagnole que du droit communautaire, le caractère insulaire des destinations concernées, citant notamment, à cet égard, l'article 227, paragraphe 2, du traité CE (devenu, après modification, article 299 CE) et la déclaration n° 30 relative aux régions insulaires, annexée au traité sur l'Union européenne.

21. Le gouvernement espagnol en déduit que «le fait insulaire se profile avec des caractéristiques et des...

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