Petra von Chamier-Glisczinski v Deutsche Angestellten-Krankenkasse.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2008:493
Date11 September 2008
Celex Number62007CC0208
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-208/07

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO Mengozzi

présentées le 11 septembre 2008 (1)

Affaire C‑208/07

Petra von Chamier-Glisczinski

contre

Deutsche Angestellten-Krankenkasse

[demande de décision préjudicielle formée par le Bayerisches Landessozialgericht München (Allemagne)]

«Sécurité sociale des travailleurs migrants – Prestations en cas de dépendance – Prestations en nature – Article 19, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71 – Citoyenneté de l’Union»






I – Introduction

1. Par décision du 15 mars 2007, le Bayerisches Landessozialgericht München (Allemagne) a soumis à la Cour, au titre de l’article 234 CE, deux questions préjudicielles, la première portant sur l’interprétation de l’article 19, paragraphe 1, sous a), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté (2), et la seconde sur l’interprétation des articles 18 CE, 39 CE et 49 CE.

2. Ces questions ont été soulevées dans le cadre d’un recours que Mme Petra von Chamier-Glisczinski a introduit contre la Deutsche Angestellten-Krankenkasse (Caisse de maladie des travailleurs salariés, ci-après la «DAK») en vue d’obtenir le remboursement des frais exposés à l’occasion de son séjour dans un établissement de soins en Autriche.

II – Cadre juridique

A – Droit communautaire

1. Les dispositions pertinentes du traité CE

3. L’article 18, paragraphe 1, CE dispose:

«Tout citoyen de l’Union a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et conditions prévues par le présent traité et par les dispositions prises pour son application.»

4. En vertu de l’article 39, paragraphes 1 à 3, CE:

«1. La libre circulation des travailleurs est assurée à l’intérieur de la Communauté.

2. Elle implique l’abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l’emploi, la rémunération et les autres conditions de travail.

3. Elle comporte le droit, sous réserve des limitations justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique:

a) de répondre à des emplois effectivement offerts;

b) de se déplacer à cet effet librement sur le territoire des États membres;

c) de séjourner dans un des États membres afin d’y exercer un emploi conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l’emploi des travailleurs nationaux;

d) de demeurer, dans des conditions qui feront l’objet de règlements d’application établis par la Commission, sur le territoire d’un État membre, après y avoir occupé un emploi.»

5. L’article 49, premier alinéa, CE dispose:

«Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la libre prestation des services à l’intérieur de la Communauté sont interdites à l’égard des ressortissants des États membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire de la prestation.»

2. Le droit dérivé

6. Les différences qui existent entre les réglementations nationales en matière de sécurité sociale constituent indéniablement un facteur d’entrave à la mobilité des travailleurs. Pour ce motif, les auteurs du traité ont conféré au Conseil la compétence pour adopter, dans ce secteur, les «mesures nécessaires pour l’établissement de la libre circulation des travailleurs». L’article 51 du traité CE (devenu, après modification, article 42 CE) préconisait, notamment, la mise en œuvre d’un «système permettant d’assurer aux travailleurs migrants et à leurs ayants droit:

a) la totalisation, pour l’ouverture et le maintien du droit aux prestations, ainsi que pour le calcul de celles-ci, de toutes périodes prises en considération par les différentes législations nationales,

b) le paiement des prestations aux personnes résidant sur les territoires des États membres.»

7. Cette compétence a été exercée par le Conseil dès 1958, avec l’adoption d’une réglementation de coordination des législations nationales dans les différents secteurs de la sécurité sociale, destinée à s’appliquer aux différents risques couverts par ces législations. Actuellement, ladite coordination est assurée par le règlement n° 1408/71 (3), dont le texte initial a été modifié à plusieurs reprises.

8. Aux fins de la présente procédure, entre notamment en ligne de compte l’article 19, paragraphes 1 et 2, premier alinéa, dudit règlement, qui dispose:

«1. Le travailleur salarié ou non salarié qui réside sur le territoire d’un État membre autre que l’État compétent et qui satisfait aux conditions requises par la législation de l’État compétent pour avoir droit aux prestations, compte tenu, le cas échéant, des dispositions de l’article 18, bénéficie dans l’État de sa résidence:

a) des prestations en nature servies, pour le compte de l’institution compétente, par l’institution du lieu de résidence, selon les dispositions de la législation qu’elle applique, comme s’il y était affilié;

b) des prestations en espèces servies par l’institution compétente selon les dispositions de la législation qu’elle applique. Toutefois, après accord entre l’institution compétente et l’institution du lieu de résidence, ces prestations peuvent être servies par cette dernière institution, pour le compte de la première, selon les dispositions de la législation de l’État compétent.

2. Les dispositions du paragraphe 1 sont applicables par analogie aux membres de la famille qui résident sur le territoire d’un État membre autre que l’État compétent, pour autant qu’ils n’aient pas droit à ces prestations en vertu de la législation de l’État sur le territoire duquel ils résident.»

9. Il convient, en outre, de rappeler la disposition de l’article 22, paragraphe 1, sous b), i), du même règlement, en vertu de laquelle:

«Le travailleur salarié ou non salarié qui satisfait aux conditions requises par la législation de l’État compétent pour avoir droit aux prestations, compte tenu, le cas échéant, des dispositions de l’article 18 et:

[…]

b) qui, après avoir été admis au bénéfice des prestations à charge de l’institution compétente, est autorisé par cette institution à retourner sur le territoire de l’État membre où il réside ou à transférer sa résidence sur le territoire d’un autre État membre

[…]

a droit:

i) aux prestations en nature servies, pour le compte de l’institution compétente, par l’institution du lieu de séjour ou de résidence, selon les dispositions de la législation qu’elle applique, comme s’il y était affilié, la durée de service des prestations étant toutefois régie par la législation de l’État compétent».

10. Le juge de renvoi fait référence, dans la première question préjudicielle, également à l’article 10 du règlement (CEE) n° 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté (4). Ledit article a été abrogé (5) par l’article 38 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement n° 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (6). En vertu dudit article 10, paragraphe 1:

«1. Ont le droit de s’installer avec le travailleur ressortissant d’un État membre employé sur le territoire d’un autre État membre, quelle que soit leur nationalité:

a) son conjoint et leurs descendants de moins de vingt et un ans ou à charge;

b) les ascendants de ce travailleur et de son conjoint qui sont à sa charge.»

B – Droit national

11. En réponse à une question posée par la Cour, le gouvernement allemand a exposé les grandes lignes du régime d’assurance contre le risque de dépendance prévu par le livre XI du code de la sécurité sociale (Sozialgesetzbuch – ci-après le «SGB»).

12. Ledit régime prévoit trois formes d’intervention en faveur des personnes dépendantes.

13. L’article 36 du livre XI du SGB dispose que les personnes nécessitant de l’assistance et des soins à domicile ont droit à des prestations en nature servies par des employés des services de soins ambulatoires conventionnés avec la caisse de dépendance. Les frais pour ces interventions sont pris en charge par la caisse dans les limites d’un plafond maximal, variable en fonction du degré de dépendance du bénéficiaire. Pour la catégorie III, ce plafond est de 1 432 euros par mois et peut être porté à 1 918 euros par mois dans les cas nécessitant une assistance intensive et continue qui comporte des frais particulièrement élevés. La caisse rémunère les interventions en fonction des tarifs établis dans la convention de prestation de services conclue avec les différents services ambulatoires. Les soins médicaux à domicile ne font pas partie des prestations en nature visées à l’article 36 et sont couverts par l’assurance maladie.

14. L’article 37 du livre XI du SGB établit que les personnes dépendantes peuvent bénéficier d’une allocation de soins mensuelle, dès lors qu’elles se procurent elles-mêmes, de façon autonome, les prestations de soins et d’assistance dont elles ont besoin. Cette allocation peut être utilisée librement par le bénéficiaire, et donc également pour le paiement de prestations qui ne sont pas couvertes par l’assurance ou qui sont servies par du personnel n’appartenant pas aux services conventionnés. Le montant de l’allocation varie, lui aussi, en fonction du degré de dépendance. Pour la catégorie III, ce montant est de 665 euros par mois.

15. L’article 38 du livre XI du SGB prévoit les prestations dites mixtes. En vertu de cette disposition, l’assuré qui n’utilise pas la totalité des prestations en nature auxquelles il a droit peut obtenir parallèlement l’allocation de...

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