Enirisorse SpA v Ministero delle Finanze.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:640
Date27 November 2003
Celex Number62001CJ0034
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-34/01,C-38/01
Arrêt de la Cour
Affaires jointes C-34/01 à C-38/01


Enirisorse SpA
contre
Ministero delle Finanze



(demandes de décision préjudicielle, formées par la Corte suprema di cassazione)

«Entreprises publiques – Transfert à des entreprises publiques d'une partie d'une taxe portuaire payée à l'État – Concurrence – Abus de position dominante – Aide d'État – Taxe d'effet équivalent – Imposition intérieure – Libre circulation des marchandises»

Conclusions de l'avocat général Mme C. Stix-Hackl, présentées le 7 novembre 2002
Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 27 novembre 2003

Sommaire de l'arrêt

1.
Aides accordées par les États – Notion – Mesures visant à compenser le coût des missions de service public assumées par une entreprise – Exclusion – Conditions – Obligations de service public clairement définies – Établissement de façon objective et transparente des paramètres servant à calculer la compensation – Limitation de la compensation au coût – Illégalité de la mesure attribuant à une entreprise publique une partie d'une taxe – Illégalité affectant uniquement la partie de la taxe reversée à l'entreprise

(Traité CE, art. 92, § 1 (devenu, après modification, art. 87, § 1, CE))

2.
Aides accordées par les États – Projets d'aides – Interdiction de mise à exécution avant la décision finale de la Commission – Effet direct – Portée – Mesure non notifiée attribuant à une entreprise publique une partie d'une taxe – Obligation pour les juridictions nationales de s'opposer à la perception de la taxe et à l'attribution de son produit

(Traité CE, art. 93, § 3 (devenu art. 88, § 3, CE))

3.
Libre circulation des marchandises – Restrictions quantitatives – Mesures d'effet équivalent – Article 30 du traité (devenu, après modification, article 28 CE) – Champ d'application – Taxe ne constituant pas une entrave interdite par les articles 12 ou 95 du traité (devenus, après modification, articles 25 CE et 90 CE) – Taxe relevant automatiquement des dispositions dudit article 30 – Exclusion

(Traité CE, art. 12, 30 et 95 (devenus, après modification, art. 25 CE, 28 CE et 90 CE))

4.
Dispositions fiscales – Impositions intérieures – Taxe portuaire attribuée à une entreprise publique indépendamment du service rendu par celle – ci – Absence de discrimination à l'encontre des produits importés – Admissibilité

(Traité CE, art. 12, 30 et 95 (devenus, après modification, art. 25 CE, 28 CE et 90 CE))
1.
L’attribution par un État membre à une entreprise publique d’une partie importante d’une taxe, telle que celle perçue dans un port à l’occasion de tout chargement et déchargement de marchandises, ainsi que la perception de celle-ci auprès des usagers doivent être qualifiées d’aide d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité (devenu, après modification, article 87, paragraphe 1, CE) pour autant qu’elles affectent les échanges entre États membres, lorsqu’elles ne sont pas liées à une mission de service public clairement définie et/ou lorsque le calcul de la compensation prétendument nécessaire à l’accomplissement de ladite mission n’a pas été effectué sur la base de paramètres préalablement définis de manière objective et transparente, afin d’éviter que cette compensation ne comporte un avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise publique concernée par rapport à d’autres entreprises concurrentes. Pour que tel ne soit pas le cas, il faut que ladite compensation n’aille pas au-delà des coûts nécessaires pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable.
Néanmoins, le caractère éventuellement illégal de la perception et de l’attribution d’une partie de la taxe, à savoir la partie reversée à l’entreprise publique, n’affecte pas le reste de la taxe versé au Trésor public.

(cf. points 31-32, 35, 39-40, 47, disp. 1)

2.
Il découle de l’effet direct reconnu à la dernière phrase du paragraphe 3 de l’article 93 du traité (devenu article 88, paragraphe 3, CE) que le caractère immédiatement applicable de l’interdiction de mise à exécution visée par cet article s’étend à toute aide qui aurait été mise à exécution sans être notifiée. Il appartient aux juridictions nationales de sauvegarder les droits des justiciables face à une éventuelle méconnaissance, de la part des autorités nationales, de l’interdiction de mise à exécution des aides, en en tirant toutes les conséquences, conformément à leur droit national, afin d’empêcher tant l’attribution d’une partie de la taxe aux entreprises bénéficiaires que la perception de celle-ci.

(cf. points 42, 47, disp. 1)

3.
Le champ d’application de l’article 30 du traité (devenu, après modification, article 28 CE) ne comprend pas celui des dispositions du traité relatives aux taxes d’effet équivalant à des droits de douane [articles 12 du traité (devenu, après modification, article 25 CE) ainsi que 16 du traité (abrogé par le traité d’Amsterdam)] ni celui des dispositions du traité relatives aux impositions intérieures discriminatoires (article 95 du traité (devenu, après modification, article 90 CE)). Il s’ensuit que si une taxe, telle que celle perçue dans un port à l’occasion de tout chargement et déchargement de marchandises, relève du champ d’application des articles 12 ou 95 du traité, ce sont les dispositions de l’un ou l’autre de ces articles qui s’appliquent et non celles de l’article 30 du traité. La circonstance éventuelle que cette taxe ne constitue pas une entrave interdite par lesdits articles 12 ou 95 n’a pas pour conséquence qu’elle relève automatiquement des dispositions dudit article 30.

(cf. points 56, 58)

4.
En l’absence de toute discrimination à l’égard des produits en provenance d’autres États membres, la mesure par laquelle un État membre prévoit la perception d’une imposition intérieure, telle qu’une taxe portuaire relative au chargement et au déchargement de marchandises, et l’attribution d’une partie importante du produit de cette imposition intérieure à une entreprise publique, sans que le montant attribué corresponde à un service effectivement rendu par celle-ci, n’enfreint pas les dispositions de l’article 95 du traité (devenu, après modification, article 90 CE).

(cf. point 62, disp. 2)




ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
27 novembre 2003(1)


«Entreprises publiques – Transfert à des entreprises publiques d'une partie d'une taxe portuaire payée à l'État – Concurrence – Abus de position dominante – Aide d'État – Taxe d'effet équivalent – Imposition intérieure – Libre circulation des marchandises»

Dans les affaires jointes C-34/01 à C-38/01,

ayant pour objet des demandes adressées à la Cour, en application de l'article 234 CE, par la Corte suprema di cassazione (Italie) et tendant à obtenir, dans les litiges pendants devant cette juridiction entre Enirisorse SpA

et

Ministero delle Finanze,
une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles 12 du traité CE (devenu, après modification, article 25 CE), 13 du traité CE (abrogé par le traité d'Amsterdam), 30 du traité CE (devenu, après modification, article 28 CE), 86 et 90 du traité CE (devenus articles 82 CE et 86 CE), 92 du traité CE (devenu, après modification, article 87 CE), 93 du traité CE (devenu article 88 CE) et 95 du traité CE (devenu, après modification, article 90 CE),

LA COUR (cinquième chambre),,



composée de M. P. Jann, faisant fonction de président de la cinquième chambre, MM. C. W. A. Timmermans, A. Rosas, D. A. O. Edward, et S. von Bahr (rapporteur), juges, avocat général: Mme C. Stix-Hackl,
greffier: M. H. von Holstein, greffier adjoint,

considérant les observations écrites présentées:

pour Enirisorse SpA, par M es G. Guarino et A. Guarino, avvocati,
pour le gouvernement italien, par M. I. M. Braguglia, en qualité d'agent, assisté de M. G. Aiello, avvocato dello Stato,
pour la Commission des Communautés européennes, par M. V. Di Bucci et M me L. Pignataro-Nolin, en qualité d'agents,

ayant entendu les observations orales d'Enirisorse SpA, représentée par M e L. Malvezzi Campeggi, avvocato, du gouvernement italien, représenté par M. G. Aiello, et de la Commission, représentée par M. V. Di Bucci et M me L. Pignataro-Nolin, à l'audience du 5 mars 2002,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 7 novembre 2002,

rend le présent



Arrêt

1
Par cinq ordonnances du 12 juillet 2000, parvenues à la Cour le 25 janvier 2001, la Corte suprema di cassazione a posé, en vertu de l’article 234 CE, cinq questions préjudicielles sur l’interprétation des articles 12 du traité CE (devenu, après modification, article 25 CE), 13 du traité CE (abrogé par la traité d’Amsterdam), 30 du traité CE (devenu, après modification, article 28 CE), 86 et 90 du traité CE (devenus articles 82 CE et 86 CE), 92 du traité CE (devenu, après modification, article 87 CE), 93 du traité CE (devenu article 88 CE) et 95 du traité CE (devenu, après modification, article 90 CE).
2
Ces questions ont été soulevées dans le cadre d’un litige opposant Enirisorse SpA (ci-après «Enirisorse») au Ministero delle Finanze (ministère des Finances) au sujet du paiement d’une taxe portuaire qui lui est réclamée par ce dernier en raison de chargements et de déchargements de marchandises dans le port de Cagliari, en Sardaigne (Italie).
La réglementation nationale
3
La loi n° 961, du 9 octobre 1967 (GURI n° 272, du 30 octobre 1967), a institué les Aziende dei mezzi meccanici e dei magazzini (entreprises responsables des équipements mécaniques et des entrepôts, ci-après, ensemble, les «Aziende» ou, au...

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