European Parliament v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1994:405
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-65/93
Date13 December 1994
Celex Number61993CC0065
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado
EUR-Lex - 61993C0065 - FR 61993C0065

Conclusions de l'avocat général Tesauro présentées le 13 décembre 1994. - Parlement européen contre Conseil de l'Union européenne. - Article 43 du traité CEE - Obligation de consulter le Parlement. - Affaire C-65/93.

Recueil de jurisprudence 1995 page I-00643


Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1. Par le présent recours, le Parlement européen demande que soit annulé, en tant qu' il a été adopté sans son avis préalable prévu par le traité, le règlement (CEE) nº 3917/92 du Conseil, du 21 décembre 1992, prorogeant en 1993 l' application des règlements (CEE) nº 3831/90, (CEE) nº 3832/90, (CEE) nº 3833/90, (CEE) nº 3834/90, (CEE) nº 3835/90 et (CEE) nº 3900/91, portant application de préférences tarifaires généralisées pour l' année 1991 à certains produits originaires de pays en développement et complétant la liste des bénéficiaires de ces préférences (1).

Le Conseil a fait valoir, pour se justifier, qu' un intérêt public imposait péremptoirement que l' acte en question fût adopté avant une certaine date et qu' il s' était avéré impossible, malgré les efforts déployés, d' obtenir en temps utile l' avis requis du Parlement. Il s' agit donc de déterminer si le Conseil peut, en présence de circonstances exceptionnelles, adopter un acte normatif en l' absence de l' avis du Parlement, dans un cas où une telle consultation est obligatoire en vertu du traité, ou si l' acte, ainsi adopté, est illégal.

La discussion porte donc sur l' équilibre institutionnel voulu par le traité, qui exige que chaque institution exerce ses compétences dans le respect de celles attribuées aux autres institutions.

2. Afin de mieux saisir les moyens et arguments avancés par les parties, il convient de rappeler brièvement comment et dans quels délais on est parvenu à adopter le règlement litigieux.

Les préférences tarifaires généralisées, comme on le sait, sont destinées à permettre à une série de produits industriels et agricoles en provenance des pays en voie de développement, généralement dans le cadre de limites quantitatives fixées à l' avance, d' accéder au marché communautaire en exonération totale ou partielle des droits de douane. Ce système a été instauré en 1971, conformément à une offre déposée par la Communauté dans le cadre de la conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced). Sa durée, initialement fixée à dix ans, a été prolongée jusqu' en 1990. A cette date, bien que la nécessité d' une révision globale du système ait été ressentie, il n' a cependant pas paru possible d' y procéder avant la conclusion des négociations commerciales multilatérales d' Uruguay, dites "Uruguay Round", relatives à la libéralisation du commerce mondial. Compte tenu du retard enregistré en la matière, on a procédé en attendant, à titre provisoire, à des prorogations annuelles du schéma en vigueur, en y apportant des adaptations limitées, en fonction de l' évolution de la situation économique internationale et communautaire.

3. C' est dans ce contexte que la Commission a, par conséquent, proposé à nouveau au Conseil de proroger jusqu' au 31 décembre 1993 le système en vigueur. Cette proposition incluait toutefois de nouveaux pays dans la liste des bénéficiaires, d' une part, pour tenir compte de l' éclatement de l' ancienne Union soviétique et, d' autre part, pour aligner la liste communautaire des pays les moins avancés sur celle des Nations unies. En outre, eu égard à la mise en oeuvre du marché unique, la Commission suggérait aussi le remplacement des contingents tarifaires répartis entre les États membres par des montants fixes à droit nul pour l' ensemble de la Communauté.

Par lettre du 22 octobre 1992, le secrétaire général du Conseil a informé le président du Parlement que le Conseil avait décidé, le même jour, de consulter le Parlement sur la proposition en question, fondée sur les articles 43 et 113 du traité, et a demandé l' application de la procédure d' urgence prévue par l' article 75 du règlement intérieur du Parlement (2). Cette demande était motivée par la nécessité d' adopter le règlement avant le 1er janvier 1993, date prévue pour son entrée en vigueur.

4. Lors de la séance du Parlement du 30 octobre suivant, la proposition fut renvoyée à la commission du développement, pour examen au fond, et à quatre autres commissions pour avis.

Le 17 novembre, le Parlement a décidé, en séance plénière, de traiter la proposition selon la procédure d' urgence et de l' examiner le 20 novembre suivant. Toutefois, à cette date, le président de la commission du développement, estimant notamment que l' inclusion des pays de l' Europe de l' Est dans la liste des bénéficiaires des préférences généralisées modifiait significativement la notion communautaire de pays en voie de développement, a demandé le renvoi en commission de la proposition pour complément d' information.

L' examen du rapport de la commission du développement a donc été inscrit à l' ordre du jour de la séance plénière du 18 décembre. Au cours de celle-ci, alors que le point allait être débattu, le président a été saisi, conformément à l' article 106 du règlement intérieur (3), d' une demande de suspension de séance. Cette demande ayant été acceptée, la discussion sur les questions restant à l' ordre du jour, y compris la résolution proposée par la commission du développement, a été reportée au 18 janvier 1993.

5. Les contacts qui ont ensuite eu lieu entre le secrétariat général du Conseil et le cabinet du président du Parlement ont mis en évidence qu' il serait impossible de tenir une session extraordinaire du Parlement avant la fin de 1992. En conséquence, le Conseil a alors adopté, le 21 décembre, le règlement en cause, en justifiant le défaut de consultation du Parlement dans les termes suivants:

"considérant qu' il est impératif d' éviter un vide juridique qui risque de porter gravement atteinte aux relations de la Communauté avec les pays en développement ainsi qu' aux intérêts des opérateurs économiques; que, par conséquent, le règlement sur l' application en 1993 du régime communautaire des préférences tarifaires généralisées doit être adopté suffisamment tôt pour qu' il puisse entrer en vigueur le 1er janvier 1993;

considérant qu' il apparaît, après consultation du président du Parlement européen, qu' il serait impossible de tenir une session extraordinaire du Parlement européen lui permettant d' adopter son avis en temps utile pour que l' adoption et la publication du règlement puissent intervenir avant la fin de 1992;

considérant que, dans ces circonstances exceptionnelles, le règlement devrait être adopté en l' absence d' un avis du Parlement européen".

Par lettre du même jour, le Parlement a été informé de l' adoption du règlement.

6. Le 18 janvier 1993, le Parlement a examiné la proposition de résolution soumise par la commission du développement et a approuvé le projet de règlement qui, entre-temps, avait déjà été adopté, en proposant toutefois dix-sept amendements et en invitant le Conseil à reconsulter le Parlement, en cas de modification substantielle du texte approuvé.

7. Relevons, enfin, que le règlement en question a été publié au Journal officiel des Communautés européennes L 396 du 31 décembre 1992, mais celui-ci n' a été diffusé par l' Office des publications que le 28 janvier 1993. C' est donc à cette date qu' il convient de se référer pour l' entrée en vigueur du règlement. Toutefois, le point de départ des effets du règlement a été fixé en fait au 1er janvier 1993.

8. A la lumière de ces éléments, la partie requérante demande l' annulation du règlement litigieux. A l' appui de sa demande, elle invoque en premier lieu la jurisprudence dite "Isoglucose", qui reconnaît à l' obligation de consulter le Parlement, dans les cas où elle est prévue, un rang "constitutionnel", dans la mesure où elle représente un élément essentiel de l' équilibre institutionnel voulu par le traité (4). La consultation du Parlement constitue dès lors une "forme" substantielle et son absence entraîne la nullité de l' acte adopté. A cet égard, les arrêts précités précisent également que "le respect de cette exigence implique l' expression, par le Parlement, de son opinion; on ne saurait considérer qu' il y est satisfait par une simple demande d' avis de la part du Conseil" (5).

9. En particulier, la contestation du Parlement met l' accent sur deux aspects.

En premier lieu, le Conseil aurait prétendu limiter la durée de la consultation, alors qu' il n' y est pas habilité par les dispositions pertinentes du traité. Telle ne serait assurément pas la finalité de la faculté qui lui est reconnue de demander au Parlement l' examen d' une proposition selon la procédure d' urgence, en application de l' article 75 précité du règlement intérieur du Parlement, ou la convocation d' une session extraordinaire au titre de l' article 139 de ce même règlement. En effet, dans les deux cas, l' assemblée parlementaire conserverait le droit de porter une appréciation différente de celle du Conseil et de considérer que l' urgence n' est pas justifiée. De toute façon, il serait également incontestable qu' aucun délai n' est imposé pour la formulation de l' avis. Le Parlement n' aurait donc aucune obligation d' émettre un avis dans les délais indiqués, ou au cours de l' éventuelle session extraordinaire.

10. D' autre part, en l' espèce, le Conseil n' aurait pas non plus établi qu' il y avait urgence à intervenir afin d' éviter un vide juridique. En réalité, il n' y aurait eu aucune obligation d' adopter le règlement litigieux avant la fin de 1992, comme la partie défenderesse l' a soutenu. La suspension des droits de douane inscrits dans le tarif douanier commun, qui découle du système des préférences généralisées, serait en effet une simple faculté dont la Communauté peut user en...

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