Federal Republic of Germany v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
Date04 March 2004
CourtCourt of Justice (European Union)
Arrêt de la Cour
Affaire C-344/01


République fédérale d'Allemagne
contre
Commission des Communautés européennes


«FEOGA – Dépenses exclues du financement communautaire – Prime à la vache allaitante – Contrôles effectués par la Commission dans certains Länder – Extrapolation des constatations aux autres Länder – Charge de la preuve – Principe de coopération loyale»

Conclusions de l'avocat général M. P. Léger, présentées le 25 septembre 2003
Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 4 mars 2004

Sommaire de l'arrêt

1.
Agriculture – FEOGA – Apurement des comptes – Refus de prise en charge de dépenses découlant d'irrégularités dans l'application de la réglementation communautaire – Contestation par l'État membre concerné – Charge de la preuve – Répartition entre la Commission et l'État membre – État membre à structure fédérale

(Règlement du Conseil nº 729/70, art. 8, § 1)

2.
États membres – Obligations – Obligation de coopération loyale avec les institutions communautaires – Réciprocité – Application aux règles de répartition de la charge de la preuve dans les litiges relatifs à l'apurement des comptes du FEOGA

(Art. 10 CE)
1.
En matière de financement de la politique agricole commune par le FEOGA, il appartient à la Commission, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, non pas de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA, et auquel il incombe de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission.
Ces règles de répartition de la charge de la preuve entre la Commission et les États membres s’appliquent indépendamment de la structure interne d’un État membre. La responsabilité du chef d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles incombe en effet aux États membres eux-mêmes, ainsi que cela résulte de l’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 729/70, relatif au financement de la politique agricole commune. Dès lors, tout comme il n’appartient pas à la Commission de se prononcer sur la répartition des compétences opérée par les règles institutionnelles de chaque État membre et sur les obligations qui, dans un État doté d’une structure fédérale, peuvent incomber respectivement aux autorités fédérales et aux autorités des États fédérés, cette même répartition des compétences ne saurait constituer une raison suffisante pour aménager les obligations qui incombent aux États membres envers la Communauté dans le cadre de la répartition de la charge de la preuve d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles.

(cf. points 58-60)

2.
Le principe de coopération loyale découlant de l’article 10 CE, qui entraîne une obligation pour les États membres de prendre toutes les mesures propres à garantir la portée et l’efficacité du droit communautaire et impose aux institutions communautaires des devoirs réciproques de coopération loyale avec les États membres, trouve application dans les règles relatives à la répartition de la charge de la preuve appliquées aux litiges relatifs à l’apurement des comptes du FEOGA. En effet, par la contribution active demandée aussi bien de la part de la Commission que des États membres, lesdites règles incitent à une coopération loyale entre ces instances dans l’établissement de l’existence ou de l’absence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles. Il s’ensuit qu’une correcte application des règles de répartition de la charge de la preuve implique, en principe, le respect de l’article 10 CE.

(cf. points 79-81)




ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
4 mars 2004(1)


«FEOGA – Dépenses exclues du financement communautaire – Prime à la vache allaitante – Contrôles effectués par la Commission dans certains Länder – Extrapolation des constatations aux autres Länder – Charge de la preuve – Principe de coopération loyale»

Dans l'affaire C-344/01, République fédérale d'Allemagne, représentée par MM. W.-D. Plessing et M. Lumma, en qualité d'agents,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. M. Niejahr, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l'annulation de la décision 2001/557/CE de la Commission, du 11 juillet 2001, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «garantie» (JO L 200, p. 28), dans la mesure où elle procède à des corrections financières relatives à des primes à la vache allaitante octroyées au cours des années 1995 et 1996, années correspondant aux exercices financiers 1996 et 1997,

LA COUR (cinquième chambre),,



composée de M. C. W. A. Timmermans (rapporteur), faisant fonction de président de la cinquième chambre, MM. A. Rosas et A. La Pergola, juges, avocat général: M. P. Léger,
greffier: Mme M. Múgica Arzamendi, administrateur principal, ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 5 juin 2003,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 25 septembre 2003,

rend le présent



Arrêt

1
Par requête déposée au greffe de la Cour le 12 septembre 2001, la République fédérale d’Allemagne a, en vertu de l’article 230 CE, demandé l’annulation de la décision 2001/557/CE de la Commission, du 11 juillet 2001, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «garantie» (JO L 200, p. 28, ci-après la «décision attaquée»), dans la mesure où elle procède à des corrections financières relatives à des primes à la vache allaitante octroyées au cours des années 1995 et 1996, années correspondant aux exercices financiers 1996 et 1997.
Le cadre juridique
2
L’article 4d du règlement (CEE) n° 805/68 du Conseil, du 27 juin 1968, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la viande bovine (JO L 148, p. 24), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 2066/92 du Conseil, du 30 juin 1992 (JO L 215, p. 49, ci-après le «règlement n° 805/68»), dispose: «1. Le producteur détenant sur son exploitation des vaches allaitantes peut bénéficier, à sa demande, d’une prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (prime à la vache allaitante). […] 5. La prime est octroyée au producteur ne livrant pas de lait, ni de produits laitiers provenant de son exploitation pendant douze mois à partir du jour de dépôt de la demande et qui, dans cette période, détient pendant au moins six mois successivement un nombre de vaches allaitantes au moins égal à celui pour lequel la prime est demandée. Toutefois, la cession de lait ou de produits laitiers effectuée directement de l’exploitation au consommateur n’empêche pas l’octroi de la prime. 6. La prime est également octroyée au producteur livrant du lait ou des produits laitiers et dont la quantité de référence individuelle visée à l’article 5 quater du règlement (CEE) n° 804/68 […], est inférieure ou égale à 60 000 kilogrammes. Dans ce cas, la prime est octroyée pour un nombre de vaches allaitantes, qui ne peut pas dépasser 10 animaux par année et par exploitation, et qui sont détenues au minimum six mois successivement à partir du jour de dépôt de la demande. […]»
3
Aux termes de l’article 4a, troisième tiret, sous i) et ii), du règlement n° 805/68, on entend par «vache allaitante»:
«i)
une vache, appartenant à une race à orientation ‘viande’ ou issue d’un croisement avec une de ces races et faisant partie d’un troupeau qui est destiné à l’élevage des veaux pour la production de viande
et
ii)
une génisse pleine, satisfaisant aux mêmes conditions, qui remplace une vache allaitante.»
4
Le règlement (CEE) n° 3886/92 de la Commission, du 23 décembre 1992, établissant les modalités d’application relatives aux régimes de primes prévus par le règlement n° 805/68 et abrogeant les règlements (CEE) n° 1244/82 et (CEE) n° 714/89 (JO L 391, p. 20), prévoit les modalités d’application des règles concernant l’octroi, notamment, de la prime à la vache allaitante.
5
Les règlements (CEE) n° 3508/92 du Conseil, du 27 novembre 1992, établissant un système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d’aides communautaires (JO L 355, p. 1, ci-après le «système intégré»), et (CEE) n° 3887/92 de la Commission, du 23 décembre 1992, portant modalités d’application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d’aides communautaires (JO L 391, p. 36), énoncent les règles applicables au traitement des demandes de primes à la vache allaitante et au contrôle de la légalité de l’octroi desdites primes.
6
Conformément à l’article 2 du règlement n° 3508/92, le système intégré comporte, notamment, une base de données informatisée, un système alphanumérique d’identification et d’enregistrement des animaux ainsi qu’un système intégré de contrôle. En vertu de l’article 13, paragraphe 1, dudit règlement, le système alphanumérique d’identification et...

To continue reading

Request your trial
21 practice notes
  • Opinion of Advocate General Kokott delivered on 11 January 2018.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 11 January 2018
    ...15 See judgments of 16 October 2003, Ireland v Commission (C‑339/00, EU:C:2003:545, paragraph 71); of 4 March 2004, Germany v Commission (C‑344/01, EU:C:2004:121, paragraph 79); and of 10 July 2014, Nikolaou v Court of Auditors of the European Union (C‑220/13 P, EU:C:2014:2057, paragraph 51......
  • Hellenic Republic v Commission of the European Communities.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 7 July 2005
    ...reasonable doubt on its part regarding the checks or data (see to that effect Netherlands v Commission, cited above, paragraph 17, and Case C-344/01 Germany v Commission [2004] ECR I-2081, paragraph 58). 48 It is therefore necessary to ascertain whether the Commission has adduced a body of ......
  • Laleh Aayhan and Others v European Parliament.
    • European Union
    • Civil Service Tribunal (European Union)
    • 30 April 2009
    ...Rec. p. I‑4219, point 18 ; du 26 novembre 2002, First et Franex, C‑275/00, Rec. p. I‑10943, point 49 ; du 4 mars 2004, Allemagne/Commission, C‑344/01, Rec. p. I‑2081, point 79, et du 20 octobre 2005, Ten Kate Holding Musselkanaal e.a., C‑511/03, Rec. p. I‑8979, point 28), et entre les insti......
  • Hellenic Republic v Commission of the European Communities.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 14 October 2004
    ...p. 26. 3– Opinion of Advocate General Jacobs in Case C-332/01 Greece v Commission [2004] ECR I-7699, points 4 to 9 and 18 to 22; and Case C-344/01 Germany v Commission [2004] ECR I-2081, paragraphs 2 to 4– Commission regulation of 26 June 1997 laying down detailed rules for the application ......
  • Request a trial to view additional results
7 cases
  • Opinion of Advocate General Kokott delivered on 11 January 2018.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 11 January 2018
    ...15 See judgments of 16 October 2003, Ireland v Commission (C‑339/00, EU:C:2003:545, paragraph 71); of 4 March 2004, Germany v Commission (C‑344/01, EU:C:2004:121, paragraph 79); and of 10 July 2014, Nikolaou v Court of Auditors of the European Union (C‑220/13 P, EU:C:2014:2057, paragraph 51......
  • Laleh Aayhan and Others v European Parliament.
    • European Union
    • Civil Service Tribunal (European Union)
    • 30 April 2009
    ...apartado 18; de 26 de noviembre de 2002, First y Franex, C‑275/00, Rec. p. I‑10943, apartado 49; de 4 de marzo de 2004, Alemania/Comisión, C‑344/01, Rec. p. I‑2081, apartado 79, y de 20 de octubre de 2005, Ten Kate Holding Musselkanaal y otros, C‑511/03, Rec. p. I‑8979, apartado 28), y entr......
  • Portuguese Republic v Commission of the European Communities.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 18 November 2004
    ...L 124, p.45. 3 – Opinion in Case C-332/01 Greece v Commission [2005] ECR I-0000 points 4 to 9 and 18 to 22; judgment of 4 March 2004 in Case C-344/01 Germany v Commission [2004] ECR I-0000, paragraphs 2 to 14. 4 – Commission Regulation (EC) No 1663/95 of 7 July 1995 laying down detailed rul......
  • Portuguese Republic v Commission of the European Communities.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 14 April 2005
    ...qu’une extrapolation de données d’une région à d’autres n’est pas interdite par principe (voir arrêt du 4 mars 2004, Allemagne/Commission, C-344/01, non encore publié au Recueil, point 61). Une telle extrapolation doit cependant toujours être justifiée par les faits. En l’espèce, le fait qu......
  • Request a trial to view additional results
3 books & journal articles
  • Fuentes del derecho de la Función Pública de la Unión Europea
    • European Union
    • Función pública de la Unión Europea: (Auto) regulación institucional. Las DGA de las instituciones europeas
    • 1 November 2014
    ...First y Franex, en el asunto C-275/00, Rec. pág. I-10943, apartado 49; Sentencia de 4 de marzo de 2004, Alemania c. Comisión, en el asunto C-344/01, Rec. pág. I-2081, apartado 79; Sentencia de 20 de octubre de 2005, Ten Kate Holding Musselkanaal y otros, en el asunto C-511/03, Rec. pág. I-8......
  • Las Disposiciones Generales de Aplicación (DGA) y otros actos atípicos en el Derecho de la Función Pública
    • European Union
    • Función pública de la Unión Europea: (Auto) regulación institucional. Las DGA de las instituciones europeas
    • 1 November 2014
    ...de 2002, First y Franex, en el asunto C-275/00, Rec. pág. I10943, apartado 49; de 4 de marzo de 2004, Alemania c. Comisión, en el asunto C-344/01, Rec. pág. I-2081, apartado 79, y de 20 de octubre de 2005, Ten Kate Holding Musselkanaal y otros, en el asunto C-511/03, Rec. pág. I-8979, apart......
  • Jurisprudencia. Índice temático
    • European Union
    • Función pública de la Unión Europea: (Auto) regulación institucional. Las DGA de las instituciones europeas
    • 1 November 2014
    ...de 2005, Ten Kate Holding Musselkanaal y otros, en el asunto C-511/03. – Sentencia de 4 de marzo de 2004, Alemania c. Comisión, en el asunto C-344/01. – Sentencia de 4 de marzo de 2004, Alemania/Comisión, en el asunto C-344/01. – Sentencia de 26 de noviembre de 2002, First y Franex, en el a......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT