Marks & Spencer plc v David Halsey (Her Majesty's Inspector of Taxes).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2005:763
Docket NumberC-446/03
Celex Number62003CJ0446
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date13 December 2005

Affaire C-446/03

Marks & Spencer plc

contre

David Halsey (Her Majesty's Inspector of Taxes)

(demande de décision préjudicielle, introduite par

la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division)

«Articles 43 CE et 48 CE — Impôt sur les sociétés — Groupes de sociétés — Dégrèvement fiscal — Bénéfices des sociétés mères — Déduction des pertes subies par une filiale résidente — Autorisation — Déduction des pertes subies dans un autre État membre par une filiale non résidente — Exclusion»

Conclusions de l'avocat général M. M. Poiares Maduro, présentées le 7 avril 2005

Arrêt de la Cour (grande chambre) du 13 décembre 2005

Sommaire de l'arrêt

Libre circulation des personnes — Liberté d'établissement — Législation fiscale — Impôt sur les sociétés — Dégrèvement fiscal — Législation nationale excluant la déduction par une société mère des pertes subies dans un autre État membre par une filiale établie sur le territoire de celui-ci — Admissibilité — Limites

(Art. 43 CE et 48 CE)

Les articles 43 CE et 48 CE ne s'opposent pas, en l'état actuel du droit communautaire, à une législation d'un État membre qui exclut de manière générale la possibilité pour une société mère résidente de déduire de son bénéfice imposable des pertes subies dans un autre État membre par une filiale établie sur le territoire de celui-ci, alors qu'elle accorde une telle possibilité pour des pertes subies par une filiale résidente.

Cependant, il est contraire aux articles 43 CE et 48 CE d'exclure une telle possibilité pour la société mère résidente dans une situation où, d'une part, la filiale non résidente a épuisé les possibilités de prise en compte des pertes qui existent dans son État de résidence au titre de l'exercice fiscal concerné par la demande de dégrèvement ainsi que des exercices fiscaux antérieurs et où, d'autre part, il n'existe pas de possibilités pour que ces pertes puissent être prises en compte dans son État de résidence au titre des exercices futurs soit par elle-même, soit par un tiers, notamment en cas de cession de la filiale à celui-ci.

(cf. point 59 et disp.)




ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

13 décembre 2005 (*)

«Articles 43 CE et 48 CE – Impôt sur les sociétés – Groupes de sociétés – Dégrèvement fiscal – Bénéfices des sociétés mères – Déduction des pertes subies par une filiale résidente – Autorisation – Déduction des pertes subies dans un autre État membre par une filiale non résidente – Exclusion»

Dans l’affaire C-446/03,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (Royaume-Uni), par décision du 16 juillet 2003, parvenue à la Cour le 22 octobre 2003, dans la procédure

Marks & Spencer plc

contre

David Halsey (Her Majesty’s Inspector of Taxes),

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. P. Jann, C. W. A. Timmermans et A. Rosas, présidents de chambre, MM. C. Gulmann (rapporteur), A. La Pergola, J.‑P. Puissochet, R. Schintgen, Mme N. Colneric, MM. J. Klučka, U. Lõhmus, E. Levits et A. Ó Caoimh, juges,

avocat général: M. M. Poiares Maduro,

greffier: Mme K. Sztranc, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er février 2005,

considérant les observations présentées:

– pour Marks & Spencer plc, par MM. G. Aaronson, QC, et P. Farmer, barrister,

– pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. M. Bethell, en qualité d’agent, assisté de MM. R. Plender, QC, et D. Ewart, barrister,

– pour le gouvernement allemand, par M. W.-D. Plessing et Mme A. Tiemann, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement hellénique, par MM. K. Boskovits et V. Kyriazopoulos, ainsi que Mmes I. Pouli et S. Trekli, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement français, par M. G. de Bergues et Mme C. Jurgensen‑Mercier, en qualité d’agents,

– pour l’Irlande, par M. D. J. O’Hagan, en qualité d’agent, assisté de M. E. Fitzsimons, SC, et de Mme G. Clohessy, BL,

– pour le gouvernement néerlandais, par Mmes H. G. Sevenster, S. Terstal et J. van Bakel, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement finlandais, par Mme A. Guimaraes-Purokoski, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement suédois, par M. A. Kruse, en qualité d’agent,

– pour la Commission des Communautés européennes, par M. R. Lyal, en qualité d’agent,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 avril 2005,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 43 CE et 48 CE.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Marks & Spencer plc (ci-après «Marks & Spencer») à l’administration fiscale britannique, au sujet du rejet par cette dernière d’une demande de dégrèvement fiscal introduite par Marks & Spencer en vue de déduire de son bénéfice imposable au Royaume‑Uni des pertes subies par ses filiales établies en Belgique, en Allemagne et en France.

Le cadre juridique national

3 Les dispositions de droit national applicables dans l’affaire au principal sont contenues dans la loi de 1988 relative aux impôts sur les revenus et les sociétés (Income and Corporation Tax Act 1988, ci-après l’«ICTA»). Elles sont présentées ci-après en considération des informations énoncées par la décision de renvoi.

Assujettissement à l’impôt sur les sociétés

4 Conformément aux articles 6, paragraphe 1, et 11, paragraphe 1, de l’ICTA, l’impôt sur les sociétés est dû sur les bénéfices des sociétés qui soit sont établies au Royaume-Uni, soit y exercent une activité commerciale par l’intermédiaire d’une succursale ou d’une agence.

5 L’article 8, paragraphe 1, de l’ICTA assujettit les sociétés résidentes à l’impôt sur les sociétés sur leurs bénéfices mondiaux. L’article 11, paragraphe 1, assujettit les sociétés non résidentes à l’impôt sur les sociétés sur les seuls bénéfices de leurs succursales ou agences établies au Royaume-Uni.

6 En vertu de conventions fiscales conclues par le Royaume-Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord, notamment, avec le Royaume de Belgique, la République fédérale d’Allemagne et la République française, les filiales étrangères de sociétés résidentes ne sont, en tant que sociétés non résidentes, assujetties à l’impôt sur les sociétés au Royaume-Uni que pour les activités commerciales exercées dans cet État membre par l’intermédiaire d’un établissement stable au sens desdites conventions.

7 Un système de crédit d’impôt est prévu par le Royaume-Uni pour prévenir les doubles impositions.

8 Ce système présente, notamment, les deux aspects suivants.

9 En premier lieu, une société établie au Royaume-Uni qui exerce une activité commerciale dans un autre État membre par l’intermédiaire d’une succursale établie dans celui-ci soit est imposée au Royaume-Uni sur les bénéfices de cette succursale et déduit de l’impôt dû l’impôt acquitté dans l’autre État membre, soit est autorisée à déduire ce dernier impôt dans le cadre de la détermination du résultat fiscal de la succursale au Royaume-Uni. Le bénéfice d’exploitation de la succursale est déterminé d’après les règles fiscales du Royaume-Uni. Une perte d’exploitation peut s’imputer sur les bénéfices de la société établie au Royaume‑Uni. Les pertes non imputées peuvent être reportées sur les exercices ultérieurs. La circonstance que la perte peut être imputée dans l’autre État membre sur les bénéfices futurs de la succursale ne fait pas obstacle à son imputation sur les bénéfices au Royaume-Uni.

10 En second lieu, une société établie au Royaume-Uni qui exerce une activité commerciale dans un autre État membre par l’intermédiaire d’une filiale établie dans celui-ci est imposée au Royaume-Uni sur les dividendes versés par cette filiale et bénéficie d’un crédit d’impôt correspondant à l’impôt acquitté dans l’autre État membre sur les bénéfices à partir desquels sont distribués les dividendes, ainsi que, le cas échéant, à toute retenue opérée à la source. Lorsque la législation sur les sociétés étrangères contrôlées n’est pas applicable, la société mère n’est pas imposée sur les bénéfices de sa filiale non résidente et elle ne peut imputer les pertes de celle-ci sur ses bénéfices.

11 En application de l’article 208 de l’ICTA, les dividendes versés à une société mère établie au Royaume-Uni par une filiale également établie dans cet État membre ne sont pas imposés, à la différence de ceux versés par une filiale établie dans un autre État membre.

Régime spécial des pertes dans le cadre des groupes de sociétés...

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