Ibrahima Diallo v État belge.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:499
Date27 June 2018
Celex Number62017CJ0246
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-246/17
62017CJ0246

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

27 juin 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Citoyenneté de l’Union européenne – Directive 2004/38/CE – Article 10, paragraphe 1 – Demande de carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union – Délivrance – Délai – Adoption et notification de la décision – Conséquences du non-respect du délai de six mois – Autonomie procédurale des États membres – Principe d’effectivité »

Dans l’affaire C‑246/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Conseil d’État (Belgique), par décision du 27 avril 2017, parvenue à la Cour le 10 mai 2017, dans la procédure

Ibrahima Diallo

contre

État belge,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur), président de chambre, MM. C. G. Fernlund, J.‑C. Bonichot, A. Arabadjiev et S. Rodin, juges,

avocat général : M. Y. Bot,

greffier : Mme V. Giacobbo-Peyronnel, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 janvier 2018,

considérant les observations présentées :

pour M. Diallo, par Me D. Andrien, avocat,

pour le gouvernement belge, par Mmes C. Pochet, M. Jacobs et L. Van den Broeck ainsi que par M. P. Cottin, en qualité d’agents, assistés de Me F. Motulsky, avocat,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par M. G. Wils ainsi que par Mme E. Montaguti, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 mars 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 10, paragraphe 1, de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO 2004, L 158, p. 77, et rectificatifs JO 2004, L 229, p. 35, et JO 2005, L 197, p. 34).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Ibrahima Diallo, ressortissant guinéen, à l’État belge au sujet du rejet de sa demande visant à obtenir une carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union européenne.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Au chapitre 2, relatif aux membres de la famille, l’article 4, paragraphe 2, sous a), de la directive 2003/86/CE du Conseil, du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial (JO L 251, p. 12), prévoit notamment :

« Les États membres peuvent, par voie législative ou réglementaire, autoriser l’entrée et le séjour, au titre de la présente directive, sous réserve du respect des conditions définies au chapitre IV, des membres de la famille suivants :

a)

les ascendants en ligne directe au premier degré du regroupant ou de son conjoint, lorsqu’ils sont à sa charge et qu’ils sont privés du soutien familial nécessaire dans le pays d’origine ».

4

Le considérant 5 de la directive 2004/38 est libellé comme suit :

« Le droit de tous les citoyens de l’Union de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres devrait, pour qu’il puisse s’exercer dans des conditions objectives de liberté et de dignité, être également accordé aux membres de leur famille quelle que soit leur nationalité. [...] »

5

L’article 1er de la directive 2004/38 dispose :

« La présente directive concerne :

a)

les conditions d’exercice du droit des citoyens de l’Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres ;

b)

le droit de séjour permanent, dans les États membres, des citoyens de l’Union et des membres de leur famille ;

c)

les limitations aux droits prévus aux points a) et b) pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. »

6

L’article 2 de ladite directive énonce :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

2)

“membre de la famille” :

a)

le conjoint ;

b)

le partenaire avec lequel le citoyen de l’Union a contracté un partenariat enregistré, sur la base de la législation d’un État membre, si, conformément à la législation de l’État membre d’accueil, les partenariats enregistrés sont équivalents au mariage, et dans le respect des conditions prévues par la législation pertinente de l’État membre d’accueil ;

c)

les descendants directs qui sont âgés de moins de vingt et un ans ou qui sont à charge, et les descendants directs du conjoint ou du partenaire tel que visé au point b) ;

d)

les ascendants directs à charge et ceux du conjoint ou du partenaire tel que visé au point b) ;

3)

“État membre d’accueil” : l’État membre dans lequel se rend un citoyen de l’Union en vue d’exercer son droit de circuler et de séjourner librement. »

7

L’article 3 de la directive 2004/38, intitulé « Bénéficiaires », prévoit, à son paragraphe 1 :

« La présente directive s’applique à tout citoyen de l’Union qui se rend ou séjourne dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité, ainsi qu’aux membres de sa famille, tels que définis à l’article 2, point 2), qui l’accompagnent ou le rejoignent. »

8

L’article 5 de la même directive, intitulé « Droit d’entrée », prévoit, à son paragraphe 2 :

« Les membres de la famille qui n’ont pas la nationalité d’un État membre ne sont soumis qu’à l’obligation de visa d’entrée, conformément au règlement (CE) no 539/2001 [du Conseil, du 15 mars 2001, fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (JO 2001, L 81, p. 1)] ou, le cas échéant, à la législation nationale. Aux fins de la présente directive, la possession de la carte de séjour en cours de validité visée à l’article 10, dispense les membres de la famille concernés de l’obligation d’obtenir un visa.

Les États membres accordent à ces personnes toutes facilités pour obtenir les visas nécessaires. Ces visas sont délivrés sans frais dans les meilleurs délais et dans le cadre d’une procédure accélérée. »

9

L’article 10 de la directive 2004/38 énonce :

« 1. Le droit de séjour des membres de la famille d’un citoyen de l’Union qui n’ont pas la nationalité d’un État membre est constaté par la délivrance d’un document dénommé “Carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union” au plus tard dans les six mois suivant le dépôt de la demande. Une attestation du dépôt de la demande de carte de séjour est délivrée immédiatement.

2. Pour la délivrance de la carte de séjour, les États membres demandent la présentation des documents suivants :

a)

un passeport en cours de validité ;

b)

un document attestant l’existence d’un lien de parenté ou d’un partenariat enregistré ;

c)

l’attestation d’enregistrement ou, en l’absence d’un système d’enregistrement, une autre preuve du séjour dans l’État membre d’accueil du citoyen de l’Union qu’ils accompagnent ou rejoignent ;

d)

dans les cas visés à l’article 2, paragraphe 2, point c) et d), les pièces justificatives attestant que les conditions énoncées dans cette disposition sont remplies ;

[...] »

Le droit belge

10

Ainsi que l’expose la juridiction de renvoi, conformément à l’article 42, paragraphe 1, de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers (Moniteur belge du 31 décembre 1980, p. 14584, ci-après la « loi du 15 décembre 1980 »), le droit de séjour sur le territoire belge est reconnu au plus tard six mois après la date de la demande.

11

Aux termes de l’article 52, paragraphe 4, deuxième alinéa, de l’arrêté royal du 8 octobre 1981 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers (Moniteur belge du 27 octobre 1981, p. 13740, ci-après l’« arrêté royal du 8 octobre 1981 »), si aucune décision relative au droit d’un membre de la famille d’un citoyen de l’Union n’est prise dans un délai de six mois suivant la demande de reconnaissance de ce droit, une carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union lui est délivrée d’office.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

12

Le 25 novembre 2014, M. Diallo, ressortissant guinéen, a introduit, en tant qu’ascendant d’un enfant de nationalité néerlandaise domicilié en Belgique, une demande tendant à obtenir une carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union.

13

Le 22 mai 2015, l’État belge a refusé de faire droit à cette demande et ordonné à M. Diallo de quitter le territoire. Cette décision aurait été notifiée à M. Diallo le 3 juin 2015.

14

Saisi d’un recours par M. Diallo, le Conseil du contentieux des étrangers (Belgique) a, par arrêt du 29 septembre 2015, annulé la décision du 22 mai 2015 sur le fondement d’un défaut de motivation.

15

Le 9 novembre 2015, les autorités belges compétentes ont adopté une nouvelle décision de refus de séjour, accompagnée d’un ordre de quitter le territoire. Elle a été notifiée à M. Diallo le 26 novembre 2015. Cette décision indiquait, en...

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