B v Land Baden-Württemberg.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:256
Docket NumberC-316/16,C-424/16
Celex Number62016CJ0316
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeCuestión prejudicial - sobreseimiento
Date17 April 2018
62016CJ0316

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

17 avril 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Citoyenneté de l’Union européenne – Droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres – Directive 2004/38/CE – Article 28, paragraphe 3, sous a) – Protection renforcée contre l’éloignement – Conditions – Droit de séjour permanent – Séjour dans l’État membre d’accueil pendant les dix années précédant la décision d’éloignement du territoire de l’État membre concerné – Période d’emprisonnement – Conséquences quant à la continuité du séjour de dix années – Relation avec l’appréciation globale d’un lien d’intégration – Moment auquel intervient ladite appréciation et critères à prendre en compte lors de celle–ci »

Dans les affaires jointes C‑316/16 et C‑424/16,

ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduites par le Verwaltungsgerichtshof Baden-Württemberg (tribunal administratif supérieur du Land du Bade-Wurtemberg, Allemagne) et par la Supreme Court of the United Kingdom (Cour suprême du Royaume-Uni), par décisions, respectivement, des 27 avril et 27 juillet 2016, parvenues à la Cour les 3 juin et 1er août 2016, dans les procédures

B

contre

Land Baden-Württemberg (C‑316/16),

et

Secretary of State for the Home Department

contre

Franco Vomero (C‑424/16),

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, M. A. Tizzano, vice–président, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. M. Ilešič, J. L. da Cruz Vilaça, A. Rosas et C. G. Fernlund, présidents de chambre, M. E. Juhász, Mme C. Toader, MM. M. Safjan, D. Šváby, Mme A. Prechal (rapporteur) et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 juillet 2017,

considérant les observations présentées :

pour B, par Me R. Kugler, Rechtsanwalt,

pour M. Vomero, par M. R. Husain, QC, MM. P. Tridimas et N. Armstrong, barristers, ainsi que par M. J. Luqmani, solicitor,

pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze et J. Möller, en qualité d’agents,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mmes C. Crane et C. Brodie ainsi que par M. S. Brandon, en qualité d’agents, assistés de M. R. Palmer, barrister,

pour le gouvernement danois, par Mme M. Wolff ainsi que MM. C. Thorning et M. N. Lyshøj, en qualité d’agent,

pour l’Irlande, par Mmes L. Williams, K. Skelly et E. Creedon ainsi que M. A. Joyce, en qualité d’agents, assistées de Mmes K. Mooney et E. Farrell, BL,

pour le gouvernement hellénique, par Mme T. Papadopoulou, en qualité d’agent,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. Bulterman et B. Koopman, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mmes E. Montaguti et M. Heller ainsi que par M. M. Wilderspin, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 24 octobre 2017,

rend le présent

Arrêt

1

Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation de l’article 28, paragraphe 3, sous a), de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO 2004, L 158, p. 77, et rectificatifs JO 2004, L 229, p. 35 et JO 2005, L 197, p. 34).

2

Ces demandes ont été présentées dans le cadre de litiges opposant, d’une part, B, un ressortissant grec, au Land Baden-Württemberg (Land du Bade-Wurtemberg, Allemagne) et, d’autre part, M. Franco Vomero, un ressortissant italien, au Secretary of State for the Home Department (ministre des Affaires intérieures, Royaume-Uni) au sujet de décisions d’éloignement dont ont respectivement fait l’objet B et M. Vomero.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 17, 18, 23 et 24 de la directive 2004/38 énoncent :

« (17)

La jouissance d’un séjour permanent pour les citoyens de l’Union qui ont choisi de s’installer durablement dans l’État membre d’accueil renforcerait le sentiment de citoyenneté de l’Union et est un élément clef pour promouvoir la cohésion sociale, qui est l’un des objectifs fondamentaux de l’Union. Il convient dès lors de prévoir un droit de séjour permanent pour tous les citoyens de l’Union et les membres de leur famille qui ont séjourné dans l’État membre d’accueil, conformément aux conditions fixées par la présente directive, au cours d’une période continue de cinq ans, pour autant qu’ils n’aient pas fait l’objet d’une mesure d’éloignement.

(18)

En vue de constituer un véritable moyen d’intégration dans la société de l’État membre d’accueil dans lequel le citoyen de l’Union réside, le droit de séjour permanent ne devrait être soumis à aucune autre condition une fois qu’il a été obtenu.

[...]

(23)

L’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leur famille pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique constitue une mesure pouvant nuire gravement aux personnes qui, ayant fait usage des droits et libertés conférés par le traité, se sont véritablement intégrées dans l’État membre d’accueil. Il convient dès lors de limiter la portée de ces mesures, sur la base du principe de proportionnalité, afin de tenir compte du degré d’intégration des personnes concernées, de la durée de leur séjour dans l’État membre d’accueil, de leur âge, de leur état de santé, de leur situation familiale et économique et de leurs liens avec leur pays d’origine.

(24)

En conséquence, plus l’intégration des citoyens de l’Union et des membres de leur famille est forte dans l’État membre d’accueil et plus forte devrait être la protection contre l’éloignement. C’est uniquement dans des circonstances exceptionnelles, pour des motifs impérieux de sécurité publique, qu’une mesure d’éloignement peut être prise contre des citoyens de l’Union ayant séjourné pendant de longues années sur le territoire de l’État membre d’accueil, notamment lorsqu’ils y sont nés et y ont séjourné toute leur vie. En outre, de telles circonstances exceptionnelles devraient également s’appliquer aux mesures d’éloignement prises à l’encontre de mineurs, afin de protéger leurs liens avec leur famille, conformément à la convention des Nations unies sur les droits de l’enfant, du 20 novembre 1989. »

4

Figurant dans le chapitre III de la directive 2004/38, intitulé « Droit de séjour », les articles 6 et 7 de cette directive, respectivement intitulés « Droit de séjour jusqu’à trois mois » et « Droit de séjour de plus de trois mois », précisent les conditions auxquelles les citoyens de l’Union et les membres de leur famille disposent de tels droits de séjour dans un État membre autre que celui dont lesdits citoyens ont la nationalité.

5

Contenu dans le chapitre IV de la directive 2004/38, intitulé « Droit de séjour permanent », l’article 16 de celle-ci énonce :

« 1. Les citoyens de l’Union ayant séjourné légalement pendant une période ininterrompue de cinq ans sur le territoire de l’État membre d’accueil acquièrent le droit de séjour permanent sur son territoire. Ce droit n’est pas soumis aux conditions prévues au chapitre III.

[...]

3. La continuité du séjour n’est pas affectée par des absences temporaires ne dépassant pas au total six mois par an, ni par des absences plus longues pour l’accomplissement d’obligations militaires ou par une absence ininterrompue de douze mois consécutifs au maximum pour des raisons importantes, telles qu’une grossesse et un accouchement, une maladie grave, des études ou une formation professionnelle, ou le détachement pour raisons professionnelles dans un autre État membre ou un pays tiers.

4. Une fois acquis, le droit de séjour permanent ne se perd que par des absences d’une durée supérieure à deux ans consécutifs de l’État membre d’accueil. »

6

Le chapitre VI de la directive 2004/38, intitulé « Limitation du droit d’entrée et du droit de séjour pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique », comprend les articles 27 à 33 de cette directive.

7

Intitulé « Principes généraux », l’article 27 de la directive 2004/38 dispose, à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1. Sous réserve des dispositions du présent chapitre, les États membres peuvent restreindre la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille, quelle que soit sa nationalité, pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. Ces raisons ne peuvent être invoquées à des fins économiques.

2. Les mesures d’ordre public ou de sécurité publique doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu concerné. L’existence de condamnations pénales antérieures ne peut à elle seule motiver de telles mesures.

Le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. Des justifications non directement liées au cas individuel concerné ou tenant à des raisons de prévention générale ne peuvent être retenues. »

8

Aux termes de l’article 28 de cette directive, intitulé « Protection contre l’éloignement » :

« 1. Avant de prendre une décision d’éloignement du territoire pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique, l’État membre d’accueil...

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